vendredi 24 août 2012

Le poivre d’Olivier Bouillère


Je croyais que le thème de la dépression était passé de mode, mais apparemment ce n’est pas le cas.
C’est le troisième roman de la rentrée littéraire que je lis, et après la dépression de la quarantaine dans Reste l’été, j’enchaine avec celle de la cinquantaine.
Pas très varié tout ça.

Lorraine Ageval passe l’été chez ses amies d’enfance Douce et Hélène dans leur maison de famille du bassin d’Arcachon.
Cela fait plus de quinze ans qu’elle n’est pas venue.
Depuis son second mariage, elle vit recluse, ne chante plus, ne fait plus de film ou d’apparition publique. Pourtant, elle a connu l’apogée de sa gloire en 1965 avec un film que l’on regarde encore, la Reine visage. Ses chansons sont toujours diffusées et quand elle sort, on la reconnaît dans la rue.
Mais son mariage est terminé et la voilà seule, vide et sans but, ne sachant pas vraiment  si cela vaut la peine de continuer.
Puis elle rencontre Iohan, un jeune paumé, 17 ans et le cœur en bandoulière, l’œil au beurre noir et la tête en vrac.
Lorraine se trouve alors un but, elle prend Iohan avec elle, le traitant comme son fils alors qu’elle n’a pas su élever le sien…

Commençons par l’histoire.
Jusqu’à la page 100, tout va bien.
C’est intéressant, on suit cette femme à la dérive, qui se retrouve seule et ne sait plus trop où elle en est.
Les phrases sont parfois maladroites, mais les relations entre les personnages fonctionnent, tous sont perdus dans une grande maison qui semble s’effondrer mais tient bon, un peu comme leurs vies.
J’attendais donc de voir comment tout cela allait évoluer, comment cet équilibre fragile qui venait de s’instaurer allait se prolonger ou au contraire se briser.
Et puis tout à coup, Lorraine rentre à Paris avec Iohan dans ses bagages, sans crier gare et sans que le lecteur en soit vraiment informé.
Soit, appelons cela un coup de tête.
C’est alors que tout se corse.
Tandis que le personnage de Lorraine suit son chemin de dépressive droguée aux tranquillisants, l’auteur emporte Iohan dans des scènes orgiaques au bois de Boulogne, en boite de nuit, dans une voiture…
Ne vous inquiétez pas, il ne vous épargnera rien, ni les positions, ni les gestes des participants, décrits avec une exactitude de phrases et de vocabulaire qui m’a franchement rebutée.
Il ne s’agit pas de pruderie, mais je ne vois pas ce que cela apporte à l’histoire. D’ailleurs, j’ai fini par passer la plupart de ces pages sans que cela m’empêche de suivre le reste. 
C’est superflu et sans lien réel avec l’histoire de Lorraine qui se serait sans doute suffit à elle-même.

Poivre de Kampot
Dans la même veine, on ne comprend pas pourquoi l’histoire se passe en 1993.
J’ai bien pensé au sida (vu tous les hommes que Iohan « croise »), mais il n’en est jamais question.
Ou alors il s’agit du Poivre du titre. Si c’est le cas, c’est un peu tordu mais admettons.
(Je ne vous en dis pas plus, ce serait dommage tout de même).

Quant au style, je l’ai parfois trouvé bancal.
Je passe sur les scènes de sexe trop crues, sans aucune poésie ni attrait dont j’ai déjà parlé.
L’auteur a choisi de raconter la majeure partie de l’histoire au présent, sans doute pour renforcer la distance avec le passé, avec la jeunesse.
Les phrases sont courtes, elles s’enchainent sans liaison apparente mais cela pourrait fonctionner s’il n’y avait pas de temps en temps une image un peu tordue.
En voici une par exemple : « les bateaux font des incisions blanches en silence sur le bassin ».
C’est forcément personnel, mais ces incisions me laissent de marbre.

Au final, cela donne donc un roman qui pourrait être intéressant, mais qui se révèle déséquilibré, avec des maladresses parfois agaçantes et un trop plein de sexe injustifié.

Évidemment, cet avis n’engage que moi.
Si vous êtes fan de roman pornographique ou si vous êtes prêt à sauter des passages pour connaître l’histoire de Lorraine Ageval, ce livre pourrait vous plaire.

Je remercie Entrée Livre et la librairie Decitre pour l’envoi de ce livre.




Une troisième lecture pour le challenge 1%  Rentrée littéraire 2012. 




20 commentaires:

  1. Et bien, non, je passe. Je soupçonne souvent les auteurs de vouloir se faire plaisir en écrivant certaines choses, et de ne pas penser à leur lecteur. Après tout, ils auraient tort de se faire plaisir : ils sont publiés.

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    1. Là, c'est clair, il s'est fait plaisir. Mais ce qui est incompréhensible, c'est que l'histoire de Lorraine ne semble pas se destiner au même type de lecteur que celle de son jeune protégé. Evidemment, du coup, le livre manque sa cible.

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  2. encore une fois....non ! décidément, l'avantage de ta sélection de livre réside dans le fait que tes avis nous évite, en tout cas moi, de m'attarder sur ces livres et me disant "et si..."
    du porno pour du porno, non merci ! et alors la crise de la cinquantaine...

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    1. Malheureusement pour moi, c'est une sélection sans coup de coeur pour le moment ;)
      Il me reste Laurent Gaudé pour rattraper tout ça, mais j'essaie d'éviter d'en attendre trop ou je serai déçu.

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  3. Comment dire, euh... je ne suis pas très tentée ! Quand je vois les résumés de romans de ce genre, je retourne bien vite à mes premières amours, du côté de la littérature américaine, scandinave, russe, italienne, que sais-je...

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    1. Le problème ici, c'est que certains éléments sont totalement absents du résumé ! Je suis comme toi, j'ai tendance à me méfier des sorties de la rentrée et je ne jure que par les valeurs sures, et cette année, je suis confortée dans mes positions.

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  4. Si je le croise un jour, pourquoi pas me faire ma propre idée mais là, je ne vais certainement pas l'acheter :D

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    1. Je ne peux pas t'encourager à l'acheter, c'est clair ;)
      Mais si tu aimes ce genre de livre, il ne faut pas que mon billet t'empêche de le lire.

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  5. Pas tentée non... Je crois que comme toit je vais pour l'instant me contenter des valeurs sûres...!

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    1. Oui, j'ai mis Laurent Gaudé au programme ce weekend. ça devrait être plus à mon goût ;)

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  6. Bon à savoir, juste avant de faire une petite razzia en librairie. Je l'écarte d'emblée, ce roman.

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  7. Tu rejoins les avis que j'ai déjà lus. Je le raye définitivement de ma liste "rentrée littéraire".

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    1. Il y en a tellement que ce serait dommage de lire celui-ci ;)

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  8. Tu as le Gaudé ? Celui-ci me tente bien plus dans la rentrée littéraire ;-)

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    1. Et tu as raison. Je suis plutôt pour promouvoir les petits auteurs, mais là, je ne peux pas, c'est trop mauvais ;)

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  9. j'espère que les autres découvertes de cette rentrée seront plus enthousiasmantes!! pour ma part je compte lire prochainement le nouveau Djian...un auteur que je suis depuis longtemps.

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    1. Je t'avoue que je n'ai jamais lu le Djian. Je lis un roman italien en ce moment, plutôt long, mais pas mal. Ce n'est pas un "coup de coeur", mais on verra ensuite avec le Gaudé. :)

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  10. D'un autre côté, il faut noter que le livre a reçu le prix littéraire Françoise Sagan. Je pense donc qu'il vaudrait le coup de le lire et de se donner un avis. Quand on voit le déluge de bonnes critiques qu'engendre 50 nuances de gris, on peut se demander si le sexe cru abordé dans les livres ne marque-t-il pas son retour dans les mœurs d'aujourd'hui.

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    1. Quel dommage que vous ayez préféré rester anonyme !
      Je n'ai pas aimé, mais cela ne signifie pas que d'autres peuvent aimer, il ne s'agit que de mon avis. Je ne connais pas e prix littéraire et ce qui le caractérise, mais tant mieux pour l'auteur.
      Par contre, je ne suis pas sûre que ce soit flatteur pour lui d'être comparé à 50 nuances. Et j'ajouterais que la maison d'édition comme le ton du livre montrent qu'il ne s'agit pas de la même catégorie d'ouvrage. Quand on lit 50 nuances, on choisit sciemment de lire un ouvrage pornographique. Ce n'est pas le cas ici, et je ne crois pas que POL soit connu pour ce genre de publication.
      Par ailleurs, je ne suis pas prude, et un peu de sexe ne me dérange pas quand il est justifié par l'histoire. Mais là, non ! Il y a un excès de scène qui ne correspondent pas à l'affichage de départ de ce livre, qui ne se justifie pas dans l'histoire et qui m'ont agacé par leur nombre.
      Mais comme je le dis aussi souvent, n'hésitez pas effectivement à vous faire votre avis personnel. Ce n'est que le mien.

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