Je n’aime pas les succès
de librairie, et les critiques professionnels semblent parfois s’être arrêtés à
la 20e page du roman.
Pourtant, cette fois, je
suis plutôt d’accord avec eux et je vous avoue d’emblée avoir été séduite par
ce roman.
Je dois tout de même
préciser que parmi les quelques journalistes que j’ai entendus, il y en avait
une très virulente qui n’avait pas aimé du tout.
Mon esprit de
contradiction est donc satisfait !
Yersin rentre à Nha Trang en cette année 1940 par
le dernier avion autorisé à décoller avant plusieurs années.
Si le voyage dure désormais 8 jours, il n’en était
pas de même lorsque Yersin s’est rendu en Indochine à la fin du 19e
siècle.
Il fallait alors passer un mois sur le bateau, où
le jeune médecin exerçait la fonction de médecin de bord.
Mais ce n’était pas son premier métier, car
lorsqu’il monta à bord, il venait de passer plusieurs années auprès de Pasteur
et faisait désormais partie de la petite bande de scientifiques que le grand
homme a ensuite envoyé au quatre coins du monde.
Yersin est d’ailleurs un précurseur, le premier à
partir à l’aventure que Pasteur laisse filer de mauvaise grâce. Mais il
s’ennuie et aspire à autre chose que les quatre murs d’un laboratoire.
Et on peut dire qu’il sera servi. D’expédition en
missions scientifiques, de barque en paquebot, Yersin défriche, trace des
routes, explore, découvre, crée, développe, élève…
Il est infatigable et
s’ennuie très vite. Il lui faut sans cesse un nouveau territoire à découvrir,
un nouveau jouet à utiliser, une nouvelle chose à fabriquer, un nouveau sujet
d’étude.
Cette énergie inépuisable
l’amènera à Bombay, à Hong Kong (où il découvre le bacille de la peste), à
Hanoi, il explore les montagnes, les fleuves, ou les rues de Paris.
Ce rythme effréné trouve
un bel équilibre avec l’écriture si particulière de Patrick Deville.
Très posé, avec des
phrases courtes qui semblent simplement décrire les pérégrinations de Yersin,
l’auteur livre un carnet de route original qui ne peut pas laisser indifférent.
La vie de Yersin nous est
décrite avec précision, mais sans état d’âme.
Le narrateur suit le
chercheur, il l’observe mais ne se fait jamais omniscient.
Le roman n’est pas pour
autant insensible et je me suis passionnée pour cet homme, bien que je sois
généralement difficile avec les narrateurs observateurs.
Le talent de Deville est
justement de nous permettre d’accéder à l’existence de cet homme, sans le
laisser paraître.
Maison de Yersin - Nha Trang |
Pour cela, il utilise de
nombreux personnages annexes.
Il fait appel à Rimbaud,
Stanley et d’autres explorateurs plus ou moins connus pour mettre en relief le
sens de l’aventure de Yersin.
J’ai parfois été peu
sensible à ces aventuriers qui surviennent dans le récit, mais on s’y fait.
Par contre, ce qui m’a
beaucoup plu, ce sont les citations des lettres de Yersin.
Deville a eu accès aux
archives de l’institut Pasteur, et a pu lire le courrier reçu et envoyé par
Yersin.
Il en a tiré de
nombreuses citations qui émaillent son récit et qui donnent l’impression
d’entendre Yersin parler au lecteur.
La figure du narrateur
est elle aussi originale, même si l’on peut la trouver un peu factice.
Deville choisit de le
personnaliser et de lui donner une figure concrète dans le récit.
Il parle de ses voyages
et de sa quête d’information en utilisant la dénomination de voyageur du futur
et manifeste sa présence avec beaucoup d’humour.
Institut Pasteur - Dalat |
Je dois néanmoins ajouter
que si ce livre m’attirait avant même de l’avoir ouvert, c’est que j’avais un a
priori très positif, dû à un séjour à Dalat pendant lequel j’avais découvert
l’institut Pasteur local, et dû également à des recherches sur la peste datant
du temps où j’étais guide conférencière.
De ce point de vue, je
n’ai vraiment pas été déçue, mais je ne suis pas sure d’être très
objective J.
C’est donc un roman que
je conseille facilement depuis que je l’ai lu, tout en ajoutant qu’il est
préférable de lire quelques lignes en librairie avant de le faire sien, car le
style de Deville est quand même très particulier.
Si vous aimez les récits
de voyage, les aventuriers, la recherche scientifique, les romans originaux et
bien écrits, vous devriez apprécier.
Un sixième roman lu pour
le challenge 1% Rentrée littéraire 2012 (objectif presque atteint, mais je continue), et un
premier roman lu pour le très sympa club des lecteurs numériques.
Au moins, tu es allée plus loin que la page 20...
RépondreEffacerça, c'est sur, et j'en ai été ravie :^D
EffacerUne critique positive qui vient s'ajouter à celles que j'avais déjà pu lire sur d'autres blogs. Ce roman est décidément très tentant!
RépondreEffacerOui, mais il est aussi très original, et je trouve cela magnifique que personne ne soit franchement contre (mais ça va finir par arriver ;^D).
EffacerC'est vrai qu'on en parle beaucoup et majoritairement en bien. Je le tenterai peut-être une fois qu'il sortira en poche.
RépondreEffacerJe ne peux pas en faire un livre voyageur vu qu'il est numérique, mais si tu le trouves à la bibliothèque, n'hésite pas :^D
Effacerah tiens, le titre ne me branchait pas, mais ton résumé me plait bien ! lecture supplémentaire à envisager...il va falloir que je prenne une année sabbatique
RépondreEffacerC'est aussi ce que je me dis, surtout quand je lutte pour avoir un peu de temps pour finir un livre ;)
Effacerj'ai également aimé ce livre. J'ai découvert le personnage de Yersin dans sa maison de Nha Trang au Vietnam et j'attendais avec impatience cette biographie. je me suis permise de vous emprunter la photo que j'ai trouvé par Google. mais je vais mettre un lien vers votre article
RépondreEffacerMerci Miriam pour le lien vers l'article. Nous n'étions pas aller à Nha Trang mais l'institut Pasteur de Dalat nous avait fait forte impression également :)
EffacerMoi-aussi, j'ai été passionné par ce livre... et par ce personnage. En le lisant, je me suis pris à le lire à haute voix, tellement les phrases se mettent bien en bouche. D'ailleurs, je vais en faire prochainement une lecture dans une librairie locale.
RépondreEffacerExcellente idée !
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