Voilà ma troisième lecture pour cette rentrée
littéraire !
Je vais à mon rythme, je l’avoue.
Ma pile à lire est haute pour cette rentrée (même si une
bonne partie est dans ma tablette), pleine de beaux romans, mais ce n’est pas
facile de trouver du temps pour m’y plonger (ce que je regrette évidemment).
J’ai tout de même trouvé le temps de lire ce roman assez
singulier dont mon Kindle me dit qu’il faut 4h20 pour le découvrir.
C’est le progrès, on ne vous donne plus le nombre de pages
mais le nombre de minutes qu’il vous faudra…
Un peu sauvage,
originale, Marcelle se laisse approcher car elle aussi est tombée sous le
charme d’Emma.
Elles se retrouvent au
lycée puis s’inscrivent à l’Ecole Normale et c’est le début d’une relation
incendiaire, mouvementée, faite de lettres, de télégrammes et de cartes
postales envoyées, demandées, attendues.
Emma forte et solaire
envahit Marcelle frêle et instable.
Alors que l’une avance
et s’épanouit, l’autre se renferme et se délite…
Quel roman singulier !
L’écriture de Claudie Hunzinger est foisonnante, elle saute
d’une époque à l’autre et part un peu dans tous les sens dans les premières
pages.
En équilibre instable permanent, la narratrice raconte
l’histoire de Marcelle et d’Emma (et de celles qui les ont entouré) à partir
des lettres de Marcelle et des cahiers d’Emma.
On sent la difficulté qu’elle a apparemment
ressenti à trouver un fil à tirer (et un seul), à se focaliser sur l’histoire
et à se repérer dans la masse de courriers qu’elle a à affronter.
L’écriture suit ce cheminement de sa pensée en sautant d’un
épisode à l’autre.
J’ai dû un peu m’accrocher, mais en quelques pages, on
s’habitue ou le récit se stabilise pour nous accrocher et nous lier à Marcelle
et Emma, puis à Hélène, Marguerite ou Thérèse.
Par contre, j’ai un peu souffert quand je me laissais aller
au récit de ces années 1920 et que la narratrice revenait brutalement au
présent en évoquant Sailor moon ou je ne sais quel personnage des mangas
contemporains.
Le name dropping récurrent m’a aussi gêné.
Emma a apparemment croisée des personnes devenues célèbres
pendant sa vie, ce qui est assez logique puisqu’elle appartenait à l’élite
intellectuelle.
Mais c’est un peu appuyé et revendiqué, c’est dommage.
Mis à part ces bémols, l’écriture est travaillée, émouvante
parfois.
L’histoire de Marcelle est touchante et tient le lecteur
jusqu’à la dernière page.
Atteinte de tuberculose, elle est envoyée au Sanatorium de
la Sainte-Feyre où elle est un peu laissée à elle-même.
Elle constitue une sorte de cénacle autour d’elle avec
d’autres jeunes filles et puis erre de villa de montagne en chalet en espérant
que chacune s’en remette, mais en se complaisant dans cette atmosphère de
maladie hors du monde.
Les vies d’Emma et de Marcelle deviennent deux mondes
parallèles qui ne se rencontrent plus qu’épisodiquement.
De lettres en lettres, la narratrice raconte qu’elle lit le
mal-être de Marcelle, ou au contraire la volonté de ne pas voir ce qu’il se
passe autour d’elle.
Les fleurs, les paysages engourdissent ou étourdissent et
tout se mêle dans tourbillon plus ou moins apaisé.
On en sort un peu étourdi par ce morceau de vie passé à
l’écart du monde, dans une atmosphère ouatée qui a finalement blessé Marcelle
bien plus que l’extérieur.
Ce n’est pas un livre confortable, c’est un récit qui
bouscule, qui est heurté, flamboyant ou lancinant.
En cette rentrée littéraire, c’est un roman original, dont
on entend peu parlé et c’est un tort.