Une très belle découverte et un gros coup
de cœur pour ce livre !
Je suis rarement super enthousiaste pour un
livre et j’utilise avec parcimonie le coup de cœur sur ce blog. Je crois bien
que je ne l’ai jamais fait encore.
Mais pour ce livre, je dois l’avouer, je me
suis souvent couchée fort tard et j’ai profité du groupe électrogène des hôtels
népalais.
Pour la petite histoire, j’ai commencé ce
livre dans l’avion pour le Népal, ou plus précisément dans le premier avion,
celui qui m’emmenait à Mumbai. J’ai donc eu un contact direct avec les hôtesses
en saris, le curry dans le plateau repas et les consignes de sécurité en hindi.
Une plongée immédiate dans la culture indienne !
C’est aussi un livre qui m’a permis de ne
pas m’endormir pendant les quatre heures d’escale à Chennai où il était 2h du
matin pour mon horloge interne.
Je l’ai poursuivi de Katmandou à Bodnath,
en passant par toute la vallée et j’ai en tête des séances de lecture à la
fenêtre en regardant l’orage qui se répercutait dans la montagne ou sur la
terrasse à l’ombre du balcon à l’heure de la sieste, après la visite de
nombreux temples tibétains.
La situation était donc favorable, mais en
plus, le livre était très très bon !
Akhila
est vieille fille. Elle vit avec sa sœur et les enfants de celle-ci dans un
petit appartement de fonction, dans la baie du Bengale. Chaque jour, elle va
travailler, et chaque jour, elle supporte sa vie. Jusqu’au jour où elle décide
de partir.
Elle prend
alors un billet de train et prépare sa valise, puis elle se rend à la gare où
elle s’apprête à passer la nuit avec 5 autres femmes dans le compartiment pour
dames du train pour Kanyakumari.
En
montant dans le train, elle fait d’abord la connaissance de Janaki, une femme
âgée qui voyage avec son mari, mais qui n’a pu avoir de billet ailleurs.
Elle
rencontre ensuite Prabha Devi, une élégante indienne entre deux ages de la
bonne société, puis la jolie Margaret qui est professeur.
La 5e
occupante du compartiment s’efface pour monter sur sa couchette et ne repartira
qu’à la fin du trajet, tandis que la 6e, une toute jeune fille,
montera en cours de route.
Lorsque
le train part, ces femmes si différentes essaient de s’installer tant bien que
mal, et la conversation s’engage à la suite d’une question exprimée par Akhila.
Cette
ambiance est propice aux confidences et elle se demande si la vie en couple est
indispensable, et si une femme peut vivre seule.
Au fil des chapitres, chacune de ces femmes
raconte tour à tour son histoire. Durant une nuit, elles vont se croiser, se
livrer, dire les choses qu’elles n’ont jamais dites à personne.
Chaque chapitre porte le nom de celle qui
raconte sa vie. L’une ne supporte plus son mari mais a trouvé un moyen de lui
faire payer les souffrances endurées. L’autre a choisi de prendre sa vie en
main après 20 ans de soumission à son mari et ses enfants. Une troisième
explique comment elle s’est accommodée de sa vie d’épouse soumise.
Ces vies sont toutes singulières tout en
parlant de toutes les femmes. Elles ne sont pas représentatives, ce ne sont pas
des modèles, mais elles portent une part d’universalité qui fait réfléchir, qui
interpelle le lecteur et surtout la lectrice.
Je me suis interrogée, j’ai été interpellée
par ces histoires. Certes, la société indienne n’est pas la notre, et il est
plus facile de vivre seule ici que là bas et pourtant, certaines choses ne
changent pas.
Quand on a une trentaine d’année et qu’on
vit avec un homme sans enfant, le mariage et la maternité reviennent souvent
dans les conversations, notamment dans la famille. Et les femmes seules sont
vues avec une certaine pitié, parfois, tout comme les hommes seuls d’ailleurs.
Il me semble que ce sont là des sujets bien
présents dans les sociétés occidentales comme dans la société indienne
traditionnelle.
Anita Nair détourne aussi avec ingéniosité
un procédé assez classique de la littérature, pour parler d’un sujet universel.
La vie des femmes en Inde n’est pas
toujours simple, mais où l’est-elle, finalement ?
L’idée d’utiliser le compartiment pour
dames comme huis clos est à la fois originale et déjà problématique. À priori,
l’idée de réserver un wagon pour les femmes est tentante. Pas de messieurs
désagréables, pas de gestes ou de regards déplacés, un environnement
sécurisant. Pourtant, cette idée me semble stigmatisante. Elle peut donner lieu
à beaucoup d’autres compartiments, pour les intouchables, les blonds, les
bruns, les petits, les grands…
Ces compartiments ont heureusement été
supprimés aujourd’hui.
Comme j’ai aimé, j’ai tendance à penser que
c’est un livre qui plaira à tout le monde.
Donc, si vous cherchez un bon livre,
dépaysant et plaisant sans négliger la réflexion, n’hésitez pas.
Ce billet devait prendre place dans le défi L’Inde en fêtes au moment du Mewar Festival d’Udaipur et il a été lu dans les temps. Le billet s’est cependant fait
attendre…