Voilà encore un livre très présent sur les blogs ces temps-ci.
Pourtant, c'est un roman assez atypique, qui aborde des thèmes vraiment particuliers.
Je ne pense pas qu'il puisse plaire à tout le monde, bien au contraire.
Il faut accepter de se laisser aller aux dérives des personnages, aux hallucinations, aux rêves ésotériques.
Il faut laisser la rationalité aux marges de ce roman.
C'est un pari qu'a fait l'auteur, mais son écriture devrait pouvoir convaincre les lecteurs réticents.
Autour du Parc Monceau, Laura fait visiter des appartements sans
conviction.
Elle entretient une relation avec son patron qui lui donne des rendez-vous
clandestins dans de grands logements vides, avant de rejoindre son chat qui
l'attend dans son petit appartement.
Mais la nuit, ses rêves la hantent.
Luna l'attire, la repousse, la maison qui lui apparaît semble la proie des
flammes sans brûler vraiment.
Puis le rêve rejoint le jour.
Lors d'une visite, un petit garçon disparaît, comme aspiré par un
appartement dont les miroirs ne renvoient plus les reflets.
Et puis il y a Élaine, la sœur de Laura, qui attend un enfant sans savoir
ce qui l'attend...
Il est difficile de savoir par où commencer pour parler
de ce roman.
Ce livre est surprenant. Il mêle le surnaturel et la
maladie pour les fondre en instillant un doute dans l'esprit du lecteur.
S'agit-il réellement de surnaturel ou Laura est-elle en
train de sombrer dans la maladie ?
Il y a néanmoins plusieurs indices qui sont placés dans
le récit et l'oriente vers le surnaturel.
Je ne vais pas les lister ici, mais le plus fragrant m'a
semblé être le nom de famille de Laura et le nom de son village d'origine.
Le kern est censé avoir une signification ésotérique qui
remonte aux druides et aux traditions celtiques. Ils symbolisaient un lieu
important et pouvaient être destinés à célébrer les anciens et les morts.
Il se teinte donc forcément d'un peu de surnaturel.
Néanmoins, le plus flagrant reste tout de même le nom de
Kardec (quoi qu'il faille sans doute s'y connaître un peu).
Il pensait être la réincarnation d'un druide portant ce
nom et si vous vous rendez sur sa tombe au Père Lachaise, vous pourrez faire un
vœu et il l'exaucera (il est censé le faire en tout cas).
Avec ces indications, il me paraissait évident que le
chemin à suivre était plutôt surnaturel.
Mais revenons au roman.
L'écriture d'Hélène Frappat est délicate, ciselée et douce.
Il n’y pas de heurts dans ce texte, pas de coups mais une lente glissade
vers la folie, la mort ou au contraire, la compréhension.
Seuls ceux qui adhèrent le sauront.
Cette écriture ciselée emporte le lecteur en utilisant les poèmes de
Tennyson, le mélange de la langue anglaise et du français, la première venant
apporter un peu d’onirisme à la seconde.
Les poèmes en anglais restent parfois hermétique à celui qui ne maîtrise
pas cette langue, mais là encore, cela s’éclaire à la fin, et l’idée principale
est transmise dans la suite du texte.
Le lecteur entre progressivement dans l’esprit de Laura,
dans ses rêves et ses obsessions.
Il sent son inquiétude, ses peurs, son égarement en
espérant le sauveur, celui qui lui tendra une main salutaire.
L’image du reflet est omniprésente, dans les reflets qui
apparaissent ou disparaissent, dans l’image de Lady of Shalott, dans ce que
l’on croit et ce qui nous échappe.
Mais tout ne nous échappe-t-il pas à un moment de nos
vies ? Et tout n’est-il pas un simple reflet de ce que l’on croit ?
Le roman pose de nombreuses questions, il utilise
beaucoup d’images, de thématiques, que je ne pourrais citer ici tant il est
riche.
Sous une apparence de simplicité, il donne à voir et à
penser et révèle une profondeur bien plus insondable que prévu.
Je ne saurais que conseiller ce roman, tout en ajoutant
qu’il ne plaira pas à tout le monde.
C’est un livre atypique qui demande à son lecteur de se
laisser aller et de se couler dans ses pages.
Mais si cela vous tente, choisissez un bon fauteuil, un
plaid, préparez-vous une tasse de thé et quittez votre réalité.
Je vous envoie aussi sur le billet de Galea qui dit beaucoup de choses aussi sur ce roman sans trop en dire, ce qui est toujours agréable :)
Une 6e lecture pour le challenge 1% de la rentrée littéraire édition 2013