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© Gabriel Augusto |
En rangeant les photos, elle était tombée sur ce cliché pris
en août 1932.
Elle se souvenait très bien de cette journée de fin d’été.
Ils avaient décidé sur un coup de tête d’aller à la plage.
C’était épique à l’époque, pas comme aujourd’hui où une
heure suffit pour assouvir un besoin d’air iodé.
Il fallait prévoir au moins une journée pour en profiter.
Ils avaient demandé à Yvonne si elle pouvait leur préparer
de quoi manger.
Evidemment, elle s’était exécutée et leur avait délivré un
festin contenu dans trois paniers d’osier au moment du départ.
La voiture de Ghislain était rouge, elle brillait sous le
soleil.
Tout le monde était monté à bord et le moteur avait fait un
bruit assourdissant.
Plusieurs heures et quelques frayeurs plus tard, ils étaient
arrivés.
Elle s’était précipitée sur la plage et avait enlevé ses
souliers.
L’air chaud l’électrisait.
Ces rayons de soleil sur sa peau lui donnaient l’impression
de renaitre.
C’était chaque fois pareil.
Elle plongeait ses doigts de pied dans le sable et sentait
les petits grains chauds qui coulaient sur ses pieds.
C’était une sensation unique.
Elle se laissait alors prendre par le plaisir d’un moment
volé à son éducation si stricte.
Si sa sœur lui servait de chaperon, elle n’allait pas pour
autant la priver de cette liberté et elle l’en avait toujours remercié pour
cette jeunesse si belle.
Ils avaient déjeuné dans le sable, et puis Paul avait
raconté être allé à l’opéra la veille et avoir vu une danseuse qui lui semblait
aussi légère qu’un papillon.
Evidemment, il fallait lui prouver qu’elles étaient capables
elles aussi de l’impressionner et elles étaient parties dans une danse
endiablée.
Les jupes volaient, les tissus dansaient autour d’elles.
La peau s’offrait au soleil et Ghislain avait sorti son
appareil photo.
Elle avait vu le cliché longtemps après cette journée
mémorable.
* Quand la voiture était sortie de la route, les bagages
n’avaient pas bougé et la pellicule avait pu être développée.
Il ne restait plus qu’elle et ces quelques photos pour le
raconter.
Bon, pour une rentrée,
c’est une fin qui s’annonçait depuis le début du texte mais qui n’est pas bien
gaie alors si vous voulez, en voici une autre.
* L’été s’en était allé, sa sœur s’était mariée avec Paul,
Ghislain avait choisi une autre vie.
Elle l’avait revu quelques mois plus tard, alors qu’il
passait à Paris.
C’est là qu’il lui avait confié cette photo avec ces
quelques mots inscrits au dos « à toi, jamais et toujours ».
C’est mieux, non ?
En tout cas, c’est un
peu moins triste
Et nous voilà repartis
pour une année d’ateliers d’écriture que je suivrai au fil de mes inspirations,
et du temps disponible.