J’ai découvert Vita
Sackville-West il y a peu d’années, lors de la sortie en poche de son roman au
titre si bien trouvé Toute passion abolie.
Les résumés sont toujours
alléchants, de même que les billets des lecteurs qui sont généralement
enchantés.
J’ai donc logiquement
cédé à la tentation, et intriguée par cette femme réputée si acide, j’ai acheté
Paola et Au temps du roi Édouard sans trouver le temps de les lire.
Et puis est venu le mois
anglais, accompagné d’un petit séjour professionnel dans une île !
Il me fallait donc une
PAL spécial île, et là encore, la tentation a été plus forte que la raison et
je me suis jetée sur Dark Island chez
mon libraire.
Comme chaque été, c’est Shirin qui a tranché.
Mrs Wilson essaie chaque année d’aller ailleurs,
de trouver une autre destination, mais sa fille finit toujours par imposer son
choix et par convaincre tout le monde que cette destination que chacun connaît
par cœur leur permettra de passer de bonnes vacances.
Il faut dire que Shirin a son petit coin à elle à
Port-Breton. Elle a ses petites habitudes.
Depuis l’enfance, elle se réfugie dans une crique
qui n’appartient qu’à elle, d’où elle peut observer au loin l’île de Storn qui
l’a fascine.
Pour rien au monde elle ne franchirait le bras de
mer qui la sépare de cette île, cela romprait le charme…
Mes sentiments concernant
ce roman sont pluriels et je ne suis pas sure d’être parvenue à saisir toute sa
complexité.
Comme il s’agit d’une
lecture commune, les différents billets que vous pourrez lire aujourd’hui
apporteront sans doute d’autres informations et je vous encourage à les
parcourir.
Pour ma part, j’ai
commencé par être un peu déçue par cette petite famille Wilson sans ambition et
sans intérêt.
Mrs Wilson m’agaçait par
sa petitesse, et j’ai eu du mal à comprendre les relations entre les
personnages car c’est évoqué assez rapidement au début du roman.
La construction du roman
m’a également surprise, puisque l’auteure a choisi de nous parler de Shirin
tous les dix ans, scindant son roman en quatre parties de 16 à 46 ans.
Et puis les choses se
sont améliorées.
J’ai saisi l’ironie dont
l’auteure faisait preuve à l’égard de certains de ses personnages, tout en
n’adhérant pas totalement à la personnalité de Shirin.
Il faut préciser que
cette ironie est particulièrement présente chez Vita Sackville-West.
De nombreux personnages
passent sous son regard, et celui-ci n’est pas tendre.
Elle appuie chaque fois
sur le défaut principal du personnage, sans pitié, présentant un type de femme
ou d’homme que chacun connaît dans son entourage.
Certains sont ridicules,
comme Mrs Jolly, fine mais trop bavarde, ou la mère de Shirin, idiote et
hystérique.
Une société du paraître
qui broie ceux qui ne s’y insèrent pas apparaît ainsi, invitant à penser qu’on
ne connaît jamais son prochain, même si on le fréquente souvent.
Et puis il y a Storn.
Cette île est finalement
le seul endroit où il semble possible de vivre vraiment sa vie, à condition que
l’on y soit autorisé.
Paradoxalement, l’île
n’enferme pas, mais elle redonne une liberté et une raison de vivre à ceux qui
y vivent.
Cet endroit qui fascine
de l’extérieur, peut révéler certains individus, comme il peut en briser
d’autres.
Vita et Virginia |
Enfin, il ne faut pas
oublier Virginia Woolf qui m’a semblé hanter les deux dernières parties du
roman.
Cristina, l’amie de
Shirin, est la seule personne qui peut l’approcher.
Leur relation est
ambivalente, faite d’amour et d’amitié mêlés, sans que chacune n’en aient
jamais rien dit à l’autre.
Les réflexions de
Cristina sont abondamment détaillées. Elle observe Shirin et essaie de la
comprendre, de décrypter ses actes, ses réactions pour l’aider à vivre.
On ne peut s’empêcher de
penser à la relation entre l’auteure et Virginia Woolf, et au mal-être de
celle-ci, qui ne se sentait pas toujours à sa place.
Pour terminer, je dirais
donc qu’il s’agit d’un livre surprenant, original et très agréable à lire.
Si vous aimez les îles,
les paysages sombres, les châteaux et l’orage, les personnages tourmentés, les
livres bien écrits, celui-ci pourrait bien vous plaire.
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