Ce livre était très présent sur les blogs au moment de la rentrée littéraire.
J'ai lu des billets enthousiastes et d'autres très négatifs, et si l'idée de le lire me plaisait, j'étais un peu refroidie par les billets négatifs.
Je n'aime pas trop les textes qui ne prennent pas le temps de construire des personnages et j'avais peur d'être frustrée par de petits portraits trop rapides.
Mais j'aurais eu tort de ne pas lire ce livre !
Le 27 octobre 1949, le Constellation F BAZN d'Air France à destination de New York décolle de Paris pour faire une première escale dans les Açores.
A son bord, des célébrités comme Marcel Cerdan et Ginette Neveu, des gens riches comme Mme Hennessy, d'autres qui partent faire fortune comme ces cinq bergers basques et une petite bobineuse d'Alsace qui va bénéficier de l'immense fortune de sa marraine.
Ce sont 37 passagers qui s'installent pour cette première étape et vont profiter du vol, accompagnés d'onze membres d'équipage.
Cerdan a pris son billet au dernier moment pour répondre à la demande de Piaf qui l'attend aux Etats-Unis avec impatience.
Un jeune couple en a fait les frais et est resté à Paris.
D'autres ont changé leur billet au dernier moment comme le luthier de Ginette Neveu, échappant ainsi à la mort, car le vol n'est jamais arrivé...
Le hasard, cet insaisissable fil de nos vies, est au coeur de ce livre.
Il se joue de nous, il nous épargne ou au contraire nous précipite dans une catastrophe.
Qui ne s'est jamais demandé ce qu'il ce serait passé s'il avait tourné à droite plutôt qu'à gauche ?
Listant les faits, il tisse un réseau de dates concomitantes qui l'amènent du vol du Constellation au mariage de Cendrars ayant eu lieu au moment du départ de l'avion.
Le fil est ténu à la fin du roman et les deux derniers chapitres sont de plus en plus éloignés de la chute de l'avion, mettant en valeur cet aspect de nos vies.
Roman de la destinée, du hasard signifiant, il éveille forcément en chacun une interrogation sur ces fils qui se croisent au moment d'une catastrophe, sur ces gens qui ne sont pas montés dans l'avion juste avant son départ, sur ceux qui allaient changer de vie, ceux qui étaient heureux, ceux qui ne l'étaient pas.
Pour exprimer l'aléatoire de nos vies tout en mettant en valeur un réseau de similitudes, des moments qui ont eu un sens pour plusieurs personnes à la fois, l'auteur utilise une structure classique d'alternance.
Cerdan devant un autre avion |
Le trajet de l'avion, celui de son double utilisé pour tenter de découvrir ce qu'il s'est passé, la description de l'enquête et l'identification des corps, ces faits sont décrits simplement, sans s'y attarder, tout en paraissant indispensables à la compréhension de l'histoire.
Et les personnes décrites sont elles-aussi représentées simplement, sans pathos et sans s'attarder, mais en parvenant à dresser une image nette de chacune d'entre elle.
Les 37 passagers ne sont pas décrits, le choix se portant sur ceux qui semblent les plus symboliques de ce passage d'un continent à l'autre, d'un changement de vie ou au contraire d'une continuité soudain brisée.
L'auteur a sûrement aussi fait son choix en fonction des informations qu'il parvenait à glaner.
L'écriture de Bosc convient parfaitement à ce thème.
Cerdan et Neveu avant le décollage |
L'auteur se laisse souvent aller à une succession de variations sur un mot comme, évidemment, le nom du modèle de l'avion : constellation.
C'est surprenant dans le premier chapitre, et c'est aussi une façon de renforcer dès le départ cette idée de corrélation.
Il en abuse un peu à la fin du roman, mais comme je l'ai évoqué plus haut, j'ai eu un peu de mal avec les 3 derniers chapitres un peu trop éloignés pour moi du coeur du roman.
Je comprends néanmoins l'idée d'aller jusqu'au bout de l'évocation de ces hasards signifiants.
Quant à la lecture audio, c'est encore une fois un très bel exemple de lecture réussie !
Le lecteur a une belle voix chaude, il lit simplement ce roman qui s'y prête bien.
Il n'y a pas d'action ou de discours et le ton est un peu monocorde, mais le roman est ainsi fait.
L'alternance des chapitres est indiquée par un changement de musique qui permet de ne pas se perdre (mais bon, on entend bien qu'on change de chapitre, hein).
A éviter si vous prenez l'avion, ce roman sera parfait au coin du feu en hiver, ou avec un bon thé sur votre canapé un dimanche de printemps.