Cette terre, c'était la sienne, faites de tourbe et d'argile, une terre lourde qui se transforme en boue lors des grosses pluies d'automne.
Elle l'avait aimée autant qu'elle l'avait détestée.
Chaque saison raisonnait pour elle différemment.
L'été amenait son lot de poussière et ses après-midi languides où l'on n'a envie de rien.
L'automne réveillait les hommes en leur rappelant que l'hiver était proche et qu'il fallait se dépêcher.
Les raisins et les foins n'attendaient pas, il fallait penser aux bêtes, aux marchés d'hiver, c'était une période intense.
L'hiver justement offrait une parenthèse qu'elle appréciait particulièrement.
On pouvait se couler au chaud dans le sofa devant la cheminée et regarder les flammes qui se reflétaient sur les boiseries du salon.
Puis Noël arrivait et l'effervescence reprenait.
La famille, les cousins, les métayers, tous étaient conviés à la maison et la fête marquait la fin de l'année et le passage du temps.
Et les derniers mois d'hiver annonçaient le printemps, chacun guettant les signes qui montreraient qu'il arrivait.
Quand il était là, on s'activait pour qu'il tienne toute ses promesses et déjà l'été pointait ses rayons à travers les pins.
Elle avait regardé tout cela passer année après année, gérant le domaine d'une main à la fois forte et douce.
Ce n'était pourtant pas ce qu'elle imaginait quand elle regardait, songeuse, l'agitation de la ville à la fenêtre du pensionnat.
Elle s'était rêvée grande voyageuse, montant à bord de bateaux immenses pour faire le tour du monde.
Elle regardait les Atlas avec envie, repérant les pays qu'elle visiterait en premier, ceux qui lui plaisaient moins mais qui seraient sur sa route.
Elle rêvait de montagnes, de mer et de grands espaces.
Elle se voyait voyageant seule avec un page comme Alexandra David-Neel dont elle avait lu tous les livres.
Sur ce point au moins, elle ne s'était pas trompée.
Elle avait abandonné ses rêves à la mort de son père pour rester au domaine avec son jeune mari qui lui avait pourtant promit de l'emmener aux Indes, au Japon, en Amérique du sud...
Et puis il l'avait laissée seule et elle s'était découverte casanière, ne voyageant plus que dans les livres.
Aujourd'hui, l'argile et la tourbe allaient l'enfermer à jamais.
Elle ne ferait plus qu'un avec son domaine adoré, son corps se décomposant lentement et se mêlant à la terre qui l'avait nourri pendant tant d'année.
Juste retour des choses.
C'est le dernier atelier de l'année et cette photo a provoqué en moi plusieurs fils différents qui partaient dans des directions vraiment très éloignées.
Et puis finalement, la fin de l'année, le cycle, la répétition, la terre et l'enracinement ont été les plus forts.
Bel été à tous les participants aux ateliers et à tous ses lecteurs...
D'autres textes chez Leiloona...
Elle l'avait aimée autant qu'elle l'avait détestée.
Chaque saison raisonnait pour elle différemment.
L'été amenait son lot de poussière et ses après-midi languides où l'on n'a envie de rien.
L'automne réveillait les hommes en leur rappelant que l'hiver était proche et qu'il fallait se dépêcher.
Les raisins et les foins n'attendaient pas, il fallait penser aux bêtes, aux marchés d'hiver, c'était une période intense.
L'hiver justement offrait une parenthèse qu'elle appréciait particulièrement.
On pouvait se couler au chaud dans le sofa devant la cheminée et regarder les flammes qui se reflétaient sur les boiseries du salon.
Puis Noël arrivait et l'effervescence reprenait.
La famille, les cousins, les métayers, tous étaient conviés à la maison et la fête marquait la fin de l'année et le passage du temps.
Et les derniers mois d'hiver annonçaient le printemps, chacun guettant les signes qui montreraient qu'il arrivait.
Quand il était là, on s'activait pour qu'il tienne toute ses promesses et déjà l'été pointait ses rayons à travers les pins.
Elle avait regardé tout cela passer année après année, gérant le domaine d'une main à la fois forte et douce.
Ce n'était pourtant pas ce qu'elle imaginait quand elle regardait, songeuse, l'agitation de la ville à la fenêtre du pensionnat.
Elle s'était rêvée grande voyageuse, montant à bord de bateaux immenses pour faire le tour du monde.
Elle regardait les Atlas avec envie, repérant les pays qu'elle visiterait en premier, ceux qui lui plaisaient moins mais qui seraient sur sa route.
Elle rêvait de montagnes, de mer et de grands espaces.
Elle se voyait voyageant seule avec un page comme Alexandra David-Neel dont elle avait lu tous les livres.
Sur ce point au moins, elle ne s'était pas trompée.
Elle avait abandonné ses rêves à la mort de son père pour rester au domaine avec son jeune mari qui lui avait pourtant promit de l'emmener aux Indes, au Japon, en Amérique du sud...
Et puis il l'avait laissée seule et elle s'était découverte casanière, ne voyageant plus que dans les livres.
Aujourd'hui, l'argile et la tourbe allaient l'enfermer à jamais.
Elle ne ferait plus qu'un avec son domaine adoré, son corps se décomposant lentement et se mêlant à la terre qui l'avait nourri pendant tant d'année.
Juste retour des choses.
C'est le dernier atelier de l'année et cette photo a provoqué en moi plusieurs fils différents qui partaient dans des directions vraiment très éloignées.
Et puis finalement, la fin de l'année, le cycle, la répétition, la terre et l'enracinement ont été les plus forts.
Bel été à tous les participants aux ateliers et à tous ses lecteurs...
D'autres textes chez Leiloona...
C'est beau tout ce que cela a ramené chez toi, et cela me parle... J'aime bien ces photos qui ouvrent l'imagination. ;)
RépondreEffacerMerci Antigone :^) Ce n'est pas toujours simple de trouver un chemin en fonction de la photo mais on finit toujours par trouver un truc !
EffacerJe suis saisie par les similitudes entre nos deux textes ! J'aime vraiment beaucoup ta description de l'attachement à une terre, à sa terre.
RépondreEffacerMerci, il fallait bien qu'elle se console d'y être restée ;^)
EffacerJ’aime l’égrenage des saisons qui rythme la vie de ton personnage. J’aime aussi cette femme qui malgré ses rêves de voyage et les promesses de son mari, est restée près de sa terre. Cette terre qui a eu le dernier mot. Merci pour cette belle histoire ! Jos (josplume.wordpress.com)
RépondreEffacerMerci Jos, elle s'est accommodée de la situation comme elle a pu ;^)
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