Ces visites me demandaient une bonne heure de route, mais j'adorais faire découvrir le jardin aux à des gens émerveillés.
Je ne connaissais pas toutes les fleurs, et c'était sans importance.
L'organisation des parterres et du jardin japonais était plus intéressante à transmettre, comme la volonté du peintre-jardinier, et surtout l'esprit de son art.
Les balancements des saules devant le bassin des nymphéas permet de mieux comprendre l'impressionnisme, l'objectif du peintre, ce qu'il voulait saisir de la lumière et de l'instant.
Monet était aussi un homme un peu particulier, bourru et solitaire, qui vivait avec une femme marié mais pas à lui.
Ce petit côté scandaleux séduisait les visiteurs, tout comme la vie quotidienne à Giverny avec tous les enfants et les commérages, le manque d'argent ou l'abondance, les visites et la culture des fleurs.
Je connais ainsi plein de petites anecdotes, les peines et les joie de ceux qui ont passé plusieurs années dans ces murs.
C'est pour cela que cette photo me touche et que j'ai eu envie de la partager avec vous.
En 1906, Alice est mariée à Monet depuis plusieurs années et leur vie s'est apaisée.
Mais sa fille préférée, Suzanne, est décédée en 1899, laissant Alice inconsolable.
Ce voyage est donc un cadeau de Monet qui espère ainsi lui redonner un peu le moral, lui qui s'absentait toujours seul d'ordinaire.
On a d'ailleurs beaucoup glosé sur ces absences solitaires, mais avec huit enfants, il fallait bien que quelqu'un s'en occupe, et Monet devait faire rentrer de l'argent.
Claude Monet et Alice Hoschedé Monet, Venise, 6 octobre 1906