Douglas
Kennedy est un auteur dont on entend beaucoup parler depuis quelques années.
S’il a connu des années difficiles pendant lesquelles personne ne voulait de
ses livres, cette période est terminée et chacune de ses nouvelles
« livraisons » est directement placée en tête de gondole, comme le montrent les rayonnages de beaucoup
de librairie actuellement.
Douglas
Kennedy parle aussi très bien le français (ce qui m’enchante en tant que prof
de français langue étrangère, bien sûr), avec une voix grave qui m’enchante
chaque fois que je l’entends.
Évidemment,
pour un livre, la voix de l’auteur n’est pas un élément primordial, mais pour
ce dernier roman, les multiples interviews données par Kennedy m’ont mise dans
l’ambiance. Il racontait sa propre expérience dans le Berlin des années 1980,
son expérience par rapport au mur, à la séparation de la ville en deux entités
autonomes, et ces informations m’ont peut-être amené à voir ce livre avec un
œil favorable.
Thomas Nesbit est un écrivain d’une quarantaine
d’années. Spécialisé dans les récits de voyage, il est toujours en déplacement
pour faire des repérages et part parfois pendant plusieurs mois loin de chez
lui avec un plaisir qu’il n’a pas su cacher à sa femme.
Comme on peut s’en douter, son couple construit
sur une base peu solide n’y résiste pas, et malgré quelques tentatives pour le
sauver, il finit par faire l’acquisition d’une maison où il s’installe seul, sur
un coup de tête en rentrant de l’enterrement de son père.
Cette séparation le place face à lui-même. Sa
fille lui rend visite, il travaille, mais n’a pas l’impression d’avoir réussi
sa vie. Il reconnait n’avoir pas réellement aimé sa femme, ses voyages sont des
fuites et il ne parvient jamais à se poser.
D’ailleurs, il prend sa voiture et s’évade en
allant faire du ski au Canada, une escapade qui finit mal et qui le renvoie
chez lui plus tôt que prévu.
Puis le paquet arrive. C’est la mention de
l’expéditeur qui le surprend d’abord. Ce nom « Petra Dussman » le
renvoie en quelques secondes à Berlin, des années auparavant.
La suite
est ce qu’il y a de plus passionnant dans ce roman, alors je vous laisse la
découvrir.
Pour ces
100 premières pages, je vous avoue avoir moyennement adhéré.
Comme
d’habitude chez Kennedy, les personnages doivent trouver leur place, leur
psychologie, leur épaisseur, mais il faut avoir la patience de voir cette
construction se monter pour apprécier la suite.
Car comme
d’habitude aussi, l’histoire de Thomas à Berlin puis l’histoire de Petra sont
vraiment intéressantes et les pages se tournent beaucoup plus facilement passé
ce premier seuil fatidique des 100 pages.
Thomas est
jeune, il est un peu arrogant en jeune auteur et sa découverte de Berlin Est et
de Berlin Ouest est marquée par la présence du mur et l’idée d’une barrière
omniprésente, même quand elle n’est pas visible.
Certains
peuvent la traverser, d’autres en sont empêchés. Elle peut s’ouvrir sur un
ailleurs opposé, mais pas pour tous.
J’ai
d’ailleurs était très surprise que les américains puissent circuler d’un côté à
l’autre pendant la journée. Je pensais l’URSS et les USA éternels ennemis et
les ennemis ne se rendent pas visite de cette façon.
Quant à
Petra, son histoire démontre le pouvoir de manipulation de la Stasi, comme
celui des services secrets américains.
Le lecteur,
par le regard de Thomas, n’a pas accès à toutes les informations, mais c’est
l’histoire de Petra qui les lui fournira, car il n’a jamais vraiment compris ce
qui lui était arrivé.
C’est donc
une histoire croisée, racontée par le biais de deux journaux intimes qui
s’entre choquent tant les versions sont différentes.
Ce choix
narratif est intéressant par rapport au sujet du roman, car il opère une petite
mise en abyme pour le lecteur qui ne dispose pas de toutes les informations.
Il entraine
aussi parfois un peu de redondance entre les deux discours et des moments
romantico-nunuches où l’ennui m’a parfois (souvent) guetté.
J’aurais
sans doute aussi apprécié d’avoir plus de détail sur Pétra, car si le
personnage de Thomas est bien construit, il manque quelque chose à cette femme
qui devient un peu un fantôme.
Et que dire
des personnages secondaires qui disparaissent complètement alors qu’on s’y
était attaché ? Le colocataire de Thomas, son collègue à la radio disparaissent
purement et simplement sans qu’on ne nous dise jamais ce qui leur est arrivé,
tout comme cette dame croisée dans l’avion. C’est dommage.
En bref,
c’est donc un roman que j’ai globalement apprécié, qui m’a fait réfléchir sur
les vies manquées, les occasions que l’on laisse passer et sur le comportement
de la Stasi pendant la période du rideau de fer.
Si vous
aimez les histoires tristes, les belles rencontres, les livres de Douglas
Kennedy, ce livre pourrait bien vous plaire.
Vous retrouverez Douglas Kennedy ici.
Vous retrouverez Douglas Kennedy ici.
Merci à
Madame Charlotte et aux éditions Belfond pour l’envoi de ce livre.