Théophile Gautier est un des auteurs classiques les plus méconnus, il me semble.
J’ai cherché pendant des années une édition complète du Capitaine Fracasse, par exemple, et il n’y a pas si longtemps qu’on peut enfin se la procurer.
J’ai l’impression que l’image qui lui est associée est plutôt celle d’un auteur de nouvelles, facile à lire pour le jeune public. Il est aussi parfois confondu avec Mérimée.
Quand j’ai vu ce livre en partenariat chez BOB, je me suis dit que ce serait un bon moyen de découvrir une nouvelle facette de cet auteur.
La collection dans laquelle ce texte est publié se nomme « Le voyage littéraire », présageant déjà des découvertes, et l’on y trouve également les voyages de Stendhal, Pierre Loti ou encore Victor Hugo.
De nombreux écrivains du 19e siècle ont raconté leurs voyages en France et ailleurs, certains sur le mode anecdotique, d’autres en tant que professionnels (comme Mérimée) et d’autres encore en tant qu’écrivain, comme c’est le cas ici.
Les textes qui sont proposés sont en effet marqués par les qualités littéraires de leur auteur.
Il ne s’agit pas de raconter simplement un voyage, mais de partager une émotion avec le lecteur, émotion provoquée par un lieu, par un paysage ou un évènement particulier.
Les descriptions sont organisées de telle façon que le lecteur puisse recomposer l’image, le tableau et revivre l’événement ou l’émotion ressentie.
Le premier texte, par exemple, raconte une visite au Mont Saint Michel. Il y a, bien sûr, une description du mont, mais le texte commence en décrivant les grandes marées qui viennent envahir la baie et noyer le mont pour le libérer au matin. La mer devient un être doué de volonté qui encercle et emprisonne.
« Quand le flot fut plus près de nous, il prit l’apparence d’un front de cavalerie composé de chevaux blancs et chargeant au galop. Les lanières d’écume imitaient le fourmillement confus des jambes, et le clapotis des vagues le piétinement des sabots ».
C’est quand même plus joli que « la mer avance à la vitesse d’un cheval au galop » !
La description du mont suit, complétée par plusieurs métaphores et comparaisons particulièrement visuelles.
Ce texte est sans doute celui qui m’a permis de me rendre compte pleinement du talent de l’auteur car le Mont Saint Michel est le seul lieu encore intact depuis l’écriture du texte.
D’autres lieux sont évoqués, mais ils ont bien changés.
Après le Mont, le lecteur suit l’écrivain de Paris à Marseille sur les routes de France mais à bord d’un bateau à vapeur. La « maladie du bleu », que nous connaissons bien aujourd’hui, pousse Gautier à descendre au soleil et à voir la mer pour devancer l’été.
Une promenade à Paris, au hasard des rues et des places, puis un texte sur un Paris futur fantasmé, rasé et reconstruit font un tableau de la capitale assez original, tout comme le voyage sur la Meuse qui les suit.
Changement de décor pour les textes suivants qui présentent une superbe excursion au Mont Blanc, et un voyage dans les Vosges.
Le dernier texte évoque les voyages littéraires, ce qui est fort savoureux après la lecture des textes de l’auteur.
En conclusion, je dirais qu’il s’agit d’une belle découverte. Cette édition présente des textes bien assemblés, qui dialoguent entre eux et donnent à la fois une image de l’écrivain et du paysage décrit.
Une belle lecture !
Merci à Blog-O-Book et aux éditions François Bourin qui m’ont envoyé ce livre.