Virginia Woolf est une auteure qui me fascine.
Je suis toujours très attirée par ses écrits, tout en
redoutant leur complexité.
J’ai lu Mrs Dalloway
il y a quelques années, encouragée par un précédent
mois anglais et j’ai La promenade au
phare dans ma PAL depuis des années (avant même que ce soit une
PAL).
Mais j’ai aussi Une pièce à
soi et pour ce mois anglais, j’ai acheté ce petit recueil de textes écrits
par Woolf et préfacés par Alberto Manguel.
Elle revendiquait une grande liberté dans cette activité
et rejetait la position dogmatique du critique « expert » qui se place
au dessus de la foule.
Elle se voulait lectrice lambda, accueillante et néanmoins
adepte d’une
« voix
inventive pour le lecteur ordinaire » qui veut que le bon lecteur
soit celui qui ait un esprit libre et créateur, lui permettant « d’explorer
au travers de la propre expérience les univers créés
par les mots d’un autre » (c’est Manguel qui
explique).
Elle rédigeait des recensions pour le Times Literary supplement de manière anonyme, comme d’autres
grands auteurs de l’époque.
Mais dans ce livre, c’est son amour pour la littérature
française
qui est mis en avant.
Les textes portent tous sur des auteurs français
(Mauriac, Montaigne, Stendhal, Madame de Sévigné, Jules Romain) ou sur des personnalités
françaises
(Marie-Antoinette, Sarah Bernardt, Louise de la Vallière).
Il y a également un petit texte sur « comment recenser un livre ».
C’est à la fois intéressant, original et cela encourage à
réfléchir
soi-même
à
sa propre pratique de lecteur, surtout quand on est blogueur et qu’on
se permet d’écrire des trucs sur les livres qu’on lit !
A la lecture de ce texte, il est fort probable de Virginia Woolf
aurait apprécié la pratique des blogs de lecteurs et nous aurait vu comme
un petit aréopage de disciples de sa philosophie de lectrice.
Elle cite d’ailleurs deux types de « recenseurs »,
ceux qui prennent le temps d’écrire un article de deux colonnes
argumenté
et ceux qui font une petite recension rapide et expéditive, avec une préférence
pour les premiers bien sûr !
Elle explique également que l’augmentation des
recensions et la diminution de leur taille furent « véritablement
catastrophique » puisqu’ « elles ont provoqué
le déclin
et la chute de la recension.
Avis qui peut peut-être nous concerner également ?
Elle rappelle enfin que si le nombre de recensions négatives
égalent
le nombre de recensions positives, les deux s’annulent et le lecteur attendra de se
faire son propre avis (ou ne le fera jamais, oubliant un roman qui ne lui fait
pas grande impression), ce qui me paraît toujours valable aujourd’hui.
J’ai également noté plein de phrases et d’extraits
de ces textes dans mon petit carnet pour les mettre dans mes cours de français
langue étrangère.
C’est parfois compliqué de la suivre, son style est exigeant
ici comme dans ses romans, mais c’est aussi très éclairant
comme ici où elle évoque la compréhension fine d’un
texte littéraire :
« pour connaître une langue il faut l’avoir
oubliée,
et c’est
là
une étape
que l’on
ne peut atteindre si l’on n’a pas inconsciemment absorbé les mots dès l’enfance ».
Les finesses de la langue échapperont alors sans doute à
un non natif qui regardera le texte avec le filtre de sa propre langue et de sa
culture.
C’est donc un petit livre rapide à lire, pour les
amoureux de la littérature française et de la littérature
anglaise, les amoureux de Virginia Woolf ou/et de la langue française.