J’ai repéré ce livre dès sa sortie parmi les publications de la rentrée littéraire de janvier 2011.
La couverture, avec cette superbe photo, m’avait attirée, tout comme le titre, assez énigmatique. Je savais que Robert Capa avait été un des grands reporters photographes du 20e siècle, qu’il avait produit un certain nombre de photos restées dans les annales du genre, et qu’il était réputé pour être un coureur de jupon.
Or, grâce aux Chroniques de la rentrée littéraire, j’ai pu choisir un livre parmi ceux de la rentrée de janvier. J’ai hésité, puis je me suis décidée pour celui-ci.
Et j’ai bien fait.
Gerta, juive polonaise, fuit son pays et le fascisme naissant pour s’installer à Paris avec sa meilleure amie Ruth. Elles vivent de petits boulots, plus ou moins clandestinement, et fréquentent des cercles un peu artistes, un peu bohèmes, composés de réfugiés et politiquement à gauche.
Au cours d’un de ces petits boulots, Ruth emmène Gerta pour une séance photo. Elles rencontrent alors André Friedmann et David Seymour, tous deux photographes.
La relation qui va se nouer entre Gerta et André est d’abord timide, puis professionnelle avant de devenir exclusive.
André initie Gerta à la photographie, il lui apprend à développer, à cadrer, à régler l’appareil. Elle lui déniche des contrats et des reportages, elle vend ses photos et lui assure du travail en continu.
Puis vient le moment où cela ne suffit plus financièrement et professionnellement. Ils ont alors l’idée de créer Robert Capa, grand journaliste américain peu disponible dont les photos sont vendues plus chers. Le subterfuge ne durera pas longtemps, mais André deviendra Robert jusqu’à la fin de sa vie.
Quand survient la guerre d’Espagne, André et Gerta (devenue Gerda Taro) vont exercer leur métier, quoi qu’il en coûte…
J’ai un faible pour la photographie, vous vous en doutez sans doute si vous fréquentez ce blog le weekend, et les romans qui en parlent me plaisent toujours. Pourtant, je ne suis pas fan des longues descriptions techniques. Il me faut donc un équilibre, et c’est ce que j’ai trouvé ici.
Ce roman est parfaitement équilibré. La guerre d’Espagne est décrite de façon à ce que le lecteur ait les informations nécessaires, sans que cela soit omniprésent. L’histoire d’André et de Gerta est belle, mais ne verse pas dans le sentimentalisme. La photographie est évoquée, sans être omniprésente.
L’auteur procède par épisodes pour nous offrir des instantanés de vie, des prises de vue sur quelques événements marquants de la vie de ces deux êtres et sur l’histoire du photojournalisme, puisque Gerda était la première femme reporter photographe.
De Paris à Madrid ou Valence, la vie de cette femme est remarquable. Elle allait chaque jour faire des photos comme on va au combat, elle prenait tous les risques et accompagnait les soldats au front. Il s’agissait tout autant de témoigner que de faire une belle photo.
L’écriture de Susana Fortes lui rend hommage et invite le lecteur à aller chercher les photos de Gerda Taro. Éclipsée par Robert Capa qui ne l’oubliera jamais, elle se révèle être une grande photographe, peut-être plus sensible aux gens, ce que le roman décrit très bien.
Le cheminement de Gerda, son apprentissage est décrit avec une sensibilité bienvenue dans un cadre historique si difficile. J’ai également été très touchée de lire que des milliers de négatifs ont été retrouvés il y a quelques années au Mexique, dévoilant des images qui s’étaient perdues, que Robert Capa avait peut-être gardé pour lui, ou confié à quelqu'un, comme celle-ci, une photo de Gerda à Madrid.
En bref, si vous êtes amoureux de la photographie, sensible à la vie des photos reportes, si vous souhaitez lire une belle histoire, jetez-vous sur ce livre.
Ce billet est programmé rien que pour vous. Je suis en vacances. N’hésitez pas à me laisser des commentaires, ils me feront très plaisir en rentrant.