lundi 4 mai 2015

Elle !

Le travail du bois m’a toujours fasciné.
Julien Ribot

Petit je regardais les ciseaux de mon grand-père avec fascination.
Leur tranchant, le fil du bois qui cédait sous la lame, les petits copeaux qui parsemaient le plancher de l’atelier, l’odeur du bois qui se dévoilait…
J’aimais passer du temps dans cet antre chaud et sombre où le bois se transformait.

Quand le moment de choisir un métier est arrivé, je suis resté dans cet atelier et j’ai poursuivi la lignée.
J’ai eu mes propres ciseaux, puis mon propre tabouret, et enfin mon propre atelier.
Là où mon grand-père transformait le bois en coffres et en chaises, je l’ai façonné pour en faire autre chose.
De mes mains sont sorties des formes arrondies, des courbes et des volutes.
Le bois a révélé des formes féminines de plus en plus épurées, de plus en plus travaillées.
Mon travail a fait grand bruit.
On me trouvait dans les plus grandes galeries mais je savais me faire désirer.
Mon atelier était parfois visité par des amateurs d’art à l’affut de la perle rare, de l’artiste qui leur permettrait de placer leur argent dans une valeur sure.
Je produisais pour eux des corps souples et déliés, des sculptures alimentaires qui leur donnait l’impression de posséder une parcelle de mon art.

Mais au fond de mon atelier, je gardais pour moi celle qui condensait tout mon art, celle qui m’attendait comme une promise, celle que je poursuivais sans jamais l’atteindre, celle qui m’intimait l’ordre de revenir sans cesse la toucher, la caresser, la remodeler, celle enfin qui se dérobait sous mes doigts.
J’avais choisi ce bois en la devinant sous l’écorce.
Son odeur, sa couleur, tout me paraissait si présent que je la voyais déjà.
Et pourtant, malgré les mois passés à la chercher, elle n’était pas encore tout à fait là.
Elle m’obsédait et me tourmentait, elle était un refuge et un supplice, elle s’agrippait et me repoussait.
J’étais à bout.
Je n’en pouvais plus de cette course sans fin.
Dans un accès de fureur, craignant de m’en prendre à elle, je l’avais cédé à cet homme qui me harcelait depuis des semaines pour que je lui livre une de mes œuvres.

Et me voilà là, le ciseau à la main.
Je n’ai pas pu.
Je n’ai pas su vivre sans elle.
Son absence m’a rongée bien plus que sa présence.
Errant dans mon atelier, je n’ai senti que le vide et le désespoir de celui qu’on a abandonné.
Ma demande était simple pourtant.
S’il avait accepté de me la rendre, nous serions reparti elle et moi simplement.
Mais il a refusé.
Et me voilà là, le ciseau à la main dont le sang goutte sur le plancher et trace une ligne de mort d’elle à moi, une ligne qui nous lie.
A jamais. 



Ma plume m’a surprise pour ce texte et s’est laissé emporter par mon amour pour ce roman de Zola que vous aurez sans doute reconnu. 


Déjà un 4e texte pour l'atelier d'écriture de Leiloona 
Les autres textes sont en lien chez elle









vendredi 1 mai 2015

Ne chatouille JAMAIS un tigre de Pamela Butchart et Marc Boutavant

Vous savez quoi ?
Il y a encore un an, je crois que je ne connaissais pas Marc Boutavant !
Grossière erreur !





Il y a quelques semaines, j'ai reçu cet album absolument génial !!
Je connais maintenant Mouk et Polka et Hortense.

Mais j'ai découvert ce tigre et cette petite fille avec bonheur, surtout quand j'ai vu les yeux de ma minette s'agrandir devant ces beaux dessins.




Et l'histoire est vraiment sympa aussi !
Zélie est une petite fille toujours un peu agitée (ça me rappelle quelqu'un d'ailleurs).
Evidemment, ses parents, sa grand-mère, la maitresse lui disent de se tenir tranquille...
Mais ce n'est pas si facile de leur obéir.




Tout attire Zélie.
Tout est bon pour faire le zouave, sauter partout, gigoter, faire le pitre.




Et puis un jour, toute la classe de Zélie va au zoo.
La maitresse fait des recommandations très strictes à tout le monde, et surtout à Zélie.
Il ne faut pas embêter les animaux !




Hélas, quand on est une petite fille qui a la bougeotte, pas facile de s'arrêter d'un seul coup.
Et si on chatouillait le tigre...




Comme vous le voyez sur la photo qui précède, il y a ensuite une belle page qui se déplie et qui illustre l'état du zoo après que Zélie ait chatouillé le tigre.
C'est un beau bazar et l'illustration est superbe mais je ne vous la montre pas, je vous laisse la surprise !




Mais ce que j'aime avec ces albums, c'est le souci du détail.
Les revers de couverture sont magnifiques et toujours dessinés en relation avec l'histoire.
Et les illustrations sont à la fois douces et pleine de petits détails.




Evidemment, Marc Boutavant n'a pas fait cet album tout seul et la plume de Pamela Butchat est venu l'accompagner pour imaginer cette histoire fraiche et amusante.
Il y aura sûrement beaucoup d'enfants (et de plus grands !) qui se reconnaitront dans cette petite fille qui doit être souvent punie.

Chez nous, l'album est en bonne place sur l'étagère des livres lus très souvent.



Merci aux éditions Nathan









jeudi 30 avril 2015

D'avril à mai...

Un mois difficile, les vacances étaient attendues, le soleil également. 
Mais il s'en va déjà et avec lui une flopée de souvenirs. 




Profiter des premiers jours de soleil.
Se rappeler de ce qu'on croyait être la dernière tétée au soleil l'an dernier et recommencer avec bonheur en profitant des rayons qui réchauffent.





Fêter Pâques en famille avec les cousins pour la première fois. 
Pas de chocolat pour ma minette mais des trucs à piocher dans l'herbe, et ça c'est déjà très rigolo ! 





Ecouter de bons livres, écouter de moins bons livres.
Crocheter, tricoter, coudre les finitions... finir les encours.
Supporter les retards de trains en mangeant des chocolats.




Profiter de Paris, trouver de beaux endroits, de belles choses, de petits détails qui allument une étincelle dans l'oeil et dans l'esprit.
Aimer son lieu de travail qui console de passer ses journées loin de son bébé.

Faire des photos rigolotes avec les jouets de sa fille. 
Etre scotchée à Instagram un peu trop souvent. 


Alerte info : Mme Noé est parti avec Didier Superchantier.
Le départ de l'arche est compromis ! 


Attendre les vacances avec impatience.
Observer son corps qui se rebelle contre les derniers jours de travail.
Sortir le miel pour lutter contre cette extinction de voix qui rend les derniers cours bien difficile.

Acheter des livres compulsivement pour supporter certaines journées (mais j'ai une excuse, c'est bientôt le mois anglais !). 




Aller à la piscine pour la première fois.
Sentir son bébé qui se détend peu à peu dans l'eau.
Retrouver l'eau chlorée, les maillots, le bruit si typique du bassin.
Attendre pour y retourner que le petit rhume passe, que le bobo cicatrise, qu'il fasse meilleur... 


Un bébé autonome, c'est chouette ! 


Penser au Népal, à ce voyage qui fut si beau et à ces gens si meurtris. 










mardi 28 avril 2015

L'île du Point Nemo de Jean-Marie Blas de Roblès { Prix Audiolib }

Voilà un roman bien singulier !
Tellement singulier que mon avis à beaucoup fluctué au fil des pages.
Tantôt enthousiaste, tantôt agacée, j'ai parfois trouvé le temps un peu long et parfois été pressée de connaitre la suite.
Ce billet sera peut-être un peu tortueux, mais je crois qu'il est à l'image de ce roman.

Holmes vient demander de l'aide à son ami Canterel pour résoudre une affaire étrange.
Sur les côtes britanniques, trois pieds ont été retrouvés chaussés de baskets d'une marque inconnue, tandis que chez Lady MacRae, tout près de là, un diamant a disparu du coffre pendant un cambriolage.
Holmes, incapable de mener l'enquête, compte sur son vieil ami pour lui donner un coup de main.
Accompagnés de Grimaux, le majordome de Holmes, de miss Charrington, la gouvernante de Canterel, ils partent tous dans un bus roulant au méthane pour rejoindre la Grande Bretagne...

Mon résumé est succinct mais comme d'habitude, j'essaie de vous donner une idée de l'histoire sans trop en dévoiler, ce qui, je pense, est indispensable pour bien lire ce livre et en profiter. 
Je l'ai ouvert sans rien en connaître.
Il me semble avoir vu passer quelques billets lors de sa sortie mais je n'ai pas retenu ce titre et je n'en savais rien. 
Le nom de l'auteur me rappelait quelque chose que j'associais a la littérature classique, mélange de Gil Blas et de Blas de Robles, ce qui n'a rien à voir.
J'ai néanmoins confiance en l'éditeur originel, Zulma, tout en sachant aussi qu'il propose des textes parfois très originaux, voire très poétiques et étranges (et qui ne me plaisent pas toujours).

Et je crois que ce dernier qualificatif est celui qui convient ici.
Ce roman est étrange tant il est hybride et complexe.
Il s'y mêle de nombreux fils et il n'est pas toujours évident d'embrasser d'un seul coup d'oeil l'ensemble du récit.
L'auteur se joue d'ailleurs clairement de nous, surtout au début et à la fin du roman.
L'incipit s'ouvre sur l'une des batailles d'Alexandre.
Comme je n'avais même pas lu l'incipit, je me suis dit qu'il allait falloir que je m'accroche pour lire 450 pages avec des noms que je pourrais connaitre (ceux des généraux d'Alexandre), mais qui me sont inconnus.
Et puis en fait non, ce n'était qu'une introduction.
Alors que j'avais situé cet épisode, je m'installais dans l'histoire d'Holmes et de Canterel, et là, nouveau retournement en changeant de chapitre.
Il m'a ensuite fallut attendre quelques chapitres pour situer l'histoire, ou plutôt les histoires car il y en a deux qui s'entremêlent et qui sont assez différentes.

Une fois la surprise passée, j'ai pu apprécier cette histoire un peu steampunk où Holmes est à contre emploi en alcoolique incapable de rien voir et surtout pas ce qui est sous son nez.
Les bus roulent au méthane, on prend le train pour traverser l'Europe, les livres n'existent pas et ne sont disponibles que sur des pupitres de lecture évidemment intransportables (l'horreur !).
L'histoire se passe pourtant dans ce qui m'a semblé être notre futur, un futur un peu sombre où une catastrophe s'est produite.
Le récit est un peu compliqué et l'intrigue policière ténue, mais ce qui est remarquable, ce sont les allusions, les références, l'intertexte qui est diffus dans tous le récit.
Jules Verne est largement présent, avec le Tour du monde en 80 jours, l'île au trésor, 20000 lieues sous les mers, Michel Strogoff sans doute aussi.
Des scènes sont reprises, une trame ou un décor, dans un récit qui coule sans problème.
Mais on trouve aussi le Crime de l'Orient Express, ce cher Hercule Poirot dans un personnage truculent à moustache soignée, un peu de Dune avec une révérende mère, Kthulu avec un monstre qui effraie des marins, et je soupçonne aussi un peu de SAS dans la seconde histoire qui est en fait l'histoire cadre.

Et c'est là que j'ai un peu coincé.
Dans la seconde histoire, qui est aussi très intéressante, il y a à la fois des réflexions sur la lecture et des scènes de sexe qui m'ont paru inutiles.
Le narrateur aborde l'histoire des lecteurs dans les manufactures de cigares à Cuba.
Je connaissais cette histoire, ce qui ne m'a pas empêché de découvrir certaines réflexions très justes alors que je suis moi-même (professionnellement) en pleine réflexion sur la lecture à voix haute.
Comme en plus j'écoutais ce livre, cela m'a semblé encore plus approprié.
A l'inverse, les histoires de fesses de Carmen et son mari m'ont gonflé et je ne vois toujours pas leur intérêt. Faire un contrepoint ? Distraire le lecteur ? (a-t-il besoin de ça ?)

@cubacoop
Pour ma part, je tacherai d'oublier ces passages pour retenir le reste si bien trouvé, l'hommage au livre et à la lecture, et le télescopage final qui est magnifique !
Je retiendrai de cette écoute/lecture la profusion d'allusion, le bonheur de lire ce texte en y reconnaissant des éléments, les réflexions sur la lecture qui m'ont souvent fait réfléchir à ma propre pratique et la résonance avec le fait de l'écouter plutôt que le lire qui va tellement bien avec le propos de l'auteur !


Et d'ailleurs, ce livre audio tient toutes ses promesses.
Le lecteur nous régale avec une voix tantôt lente, tantôt vive, en changeant de ton en fonction des personnages.
Il y en a tellement que ces changements sonores permettent de suivre le fil et de rester attentif.
C'est un vrai bonheur de l'entendre, et comme je le disais plus haut, cela fait écho au contenu du livre d'une belle manière.
Une vraie réussite !


Si vous avez une explication pour ces scènes de sexe, n'hésitez pas à la partager.
Et si une scène de découverte d'un cadavre dans une boutique d'antiquités de Shanghai vous fait penser à quelque chose, n'hésitez pas également à partager, parce que je n'arrive pas à la situer mis à part dans James Bond ^-^.



Livre lu/écouté dans le cadre du Prix Audiolib.
















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