Je suis une midinette !
Voilà, c’est dit !
Mais pour être honnête, je dirais que je suis aussi ce qu’on peut qualifier d’intello.
Cela provoque chez moi des télescopages d’avis de lecture.
Je m’explique. J’aime lire des romans qui se finissent bien, avec des héroïnes jeunes et intrépides à qui il arrive plein de trucs et qui rencontrent de beaux inconnus (ou pas). J’ai donc dans ma bibliothèque des séries complètes de Juliette Benzoni ou Mireille Calmel (avec une préférence pour la seconde), et j’ai déjà lu une bonne dizaine d’Harlequin (pour ma thèse, bien sûr !).
J’aime aussi lire et décortiquer les sous-entendus graveleux disséminés par Flaubert dans Madame Bovary ou L’Éducation sentimentale, déceler la critique politique et sociale chez Hugo ou Zola, admirer les descriptions chez Balzac et apprécier Barbey d’Aurevilly ou Huysmans (je suis très 19e). J’aime peut-être même davantage, sans doute un reste de mes études de lettres.
Le problème, c’est que cela provoque parfois chez moi des télescopages et que je ne sais plus quoi penser du livre que je suis en train de lire, et il me faut choisir.
Pour le livre dont je vais vous parler aujourd’hui, j’ai choisi : ce sera midinette !
Je vous avertis donc dès le départ, il y a des stéréotypes dans ce roman, il y a quelques clichés (le bel Italien, la villa toscane, le maffioso, la Mamma…) mais je ne vous en parlerai pas, parce que la midinette qui est en moi a adoré !
Vous me direz que je suis un peu trop fleure bleue et plutôt bon public, et vous aurez raison, mais c’est comme ça !
Mais de quoi ça parle ?
Julie Jacobs est une jeune américaine orpheline, élevée par sa tante et en froid avec sa sœur jumelle Janice. Passionnée par Shakespeare, elle connait Roméo et Juliette par cœur et végète un peu dans sa vie, jusqu’au jour où sa tante décède.
Pour tout héritage, la tante Rose laisse à Janice sa maison, et à Julie une lettre et la clé d’un coffre en Italie. Déçue et déstabilisée, la jeune Julie prend connaissance de cette lettre, où sa tante lui explique qu’elle s’appelle en réalité Giulietta Tolomei et que son destin l’attend en Italie.
Ne sachant plus où elle en est, Julie décide de jouer le jeu et d’aller en Italie. En route pour Sienne, berceau de sa famille, elle rencontre une aristocrate italienne, Eva Maria qui va la guider dans la ville mais qui pourrait aussi être son ennemi mortel. Car Julie doit se méfier de tout et de tous. Dès son arrivée, elle est suivi, sa chambre est cambriolée, et malgré la beauté de la ville, toute cette affaire semble bien dangereuse.
Ah ! La passion, l’Italie, le soleil, un bel Italien ! Que demander de plus ? De l’aventure, bien sûr !
Eh bien dans ce roman, il y en a. Anne Fortier a su construire une histoire bien faite, ingénieuse, et certains éléments ne se dévoilent que dans les dernières pages, sans paraître artificiels. Le parcours de Julie-Giulietta est cohérent, et le lecteur se prend vite au jeu des hypothèses pour deviner qui est réellement un ami et qui ne l’est pas.
Mais la bonne idée de l’auteur, c’est d’avoir alterné les chapitres qui concernent Julie et l’époque contemporaine et ceux qui racontent l’histoire originelle de Romeo et Juliette au 14e siècle. Car cette histoire ne s’est pas passée à Vérone, et si l’on en croit le texte placé à la fin, c’est vrai !
Romeo et Juliette étaient Siennois, et leur histoire était un peu plus sordide que celle qu’on connait. L’héroïne étant descendante de cette Juliette mythique, elle se sent prisonnière de la malédiction qui touchait ces deux amants, et le lecteur est autant intéressé par l’histoire de Julie que par celle de Juliette.
Le suspens est constant, et les personnages sont suffisamment consistants pour que l’on s’identifie à eux.
Il me faut aussi dire quelques mots du décor.
Sienne est ma ville italienne préférée. C’est beau, typique et en même temps unique, et on s’y sent bien. Alors quand j’ai vu que ce livre se déroulait à Sienne, je n’ai pas hésité. Et j’ai eu raison. Même si les descriptions ne coulent pas sur plusieurs pages, elles permettent de se mettre dans l’ambiance, et rendent bien l’atmosphère de ces petites rues tortueuses, des contrade et du pallio.
Du coup, j’ai ressorti mon DVD de Roméo et Juliette, la version avec Leonardo Di Caprio où les dialogues sont ceux de la pièce de Shakespeare, et je vais même lire la pièce.
Bref, un vrai bon moment de lecture, dixit la lectrice midinette qui est en moi.
D’autres avis chez L’Irrégulière qui a aussi deux personnalités de lectrices, chez Pimprenelle et chez lasardine, qui ont beaucoup aimé, comme moi …