Pralines a proposé il y a quelques semaines un challenge à partir du roman de Laurence Cossé intitulé Au bon roman.
La liste impressionnante des romans cités dans ce livre m'a intrigué, et lors d'un passage dans ma librairie préférée, je n'ai pu résister à la tentation de mettre ce livre dans mon panier. Édité en Folio, il ne faisait pas un gros trou dans mon budget, et la quatrième de couverture était plutôt alléchante.
Il s'agissait de personnages « tendres », de « librairie idéale », de « chefs-d'œuvre », d'un « ancien routard devenu libraire » ou d'une « mécène mélancolique ».
Je partais donc avec les meilleurs a priori.
Pourtant, en lisant les premières pages, j'ai eu pas mal de difficultés et j'ai failli laisser tomber le roman plusieurs fois. Le narrateur intervient de manière tranchée dans un récit très classique par ailleurs. Ce sont de petites phrases, mais leur irruption m'a gêné. Elles contredisent ce qui vient d'être dit, sans que cela amène véritablement quelque chose à la narration. Je me suis demandé ce que l'auteur voulait exprimer sur son narrateur en procédant ainsi, mais il me semble que cela n'apporte pas grand chose. On devine immédiatement que le narrateur est un individu qui est impliqué dans l'histoire.
Passées les 50 premières pages, j'ai sans doute fini par m'habituer, mais je ne regrette pas du tout d'avoir persévéré !
Van est un petit libraire insatisfait qui se refuse à vendre les mauvais romans commerciaux que produisent les maisons d'édition chaque année. Mais la librairie où il travaille n'est pas à lui, et son patron décide de le virer. Francesca cherche un libraire pour mettre en œuvre un projet qui lui tient à cœur depuis longtemps : ouvrir une librairie où ne seront vendus que les bons romans. Ces deux là étaient faits pour se rencontrer. Mais comment choisir ces romans ? Un comité secret de huit écrivains va être constitué, chacun devant fournir une liste de noms. Seuls Van et Francesca connaissent les noms des membres du comité, le secret garantissant l'objectivité du choix.
Mais voilà, les membres du comité sont agressés les uns après les autres et la librairie est attaquée de toutes parts... Désigner les « bons » livres ne plait pas à tout le monde !
L'intrigue développée permet à l'auteur d'aborder des problématiques qui me touchent particulièrement. Qu'est-ce que la « bonne » littérature ? Comment peut-on dire d'un livre qu'il appartient à la littérature ? Et cette littérature élitiste peut-elle réellement être définie autrement que par l'institution ou doit-elle l'être par certains lecteurs ? Faut-il bruler les livres qui ne trouvent pas grâce à leurs yeux ? Faut-il jeter l'anathème sur les lecteurs qui ne peuvent pas ou ne se sentent pas capable de lire ces livres ? Le ressenti est effectivement très important dans cette affaire.
La réponse proposée ici est elle-même à interroger. Le comité de sélection est composé d'écrivains considérés comme des lecteurs. C'est ce statut qui importe pour le choix des romans, mais leur statut d'écrivain reconnu est tout aussi important. Ce sont des figures de l'institution et ce caractère institutionnel est censé garantir leur aptitude à faire un choix. Alors, bien sûr, les clients font des propositions, mais elles sont soumises au comité !
J'ai toujours des difficultés à rejeter ainsi une partie du lectorat en rejetant une partie (la plus grande) de la production. Certes, de nombreuses biographies de footballeurs gagneraient à ne pas être imprimées, mais si un Harlequin (XD) ravi une mère au foyer pendant ses vacances, pourquoi pas ?
Les librairies, qu'elles soient des petites ou des grandes surfaces, ne représentent que 39% des ventes de livres. Tout le reste est acheté en grande surface, en maison de la presse ou dans des kiosques. Si ce type de librairie est bien séduisant, je reste tout de même sceptique.
Ce qui ne veut pas dire que je sois contre la littérature. Au contraire. Je trouve même qu'il faudrait l'imposer davantage dans nos classes (dans les lycées professionnels par exemple). Mais je suis sûrement pervertie par ma fonction de prof de langue étrangère. Quand une de mes étudiantes américaines a lu un Harlequin jusqu'au bout, c'est une grande victoire que nous fêtons dignement. Il en est de même si elle a lu Le Petit Prince !
La littérature est vaste pour convenir à tous les lecteurs. Pourquoi la restreindre ?
Je pense que ce billet a besoin d'un petit récapitulatif en guise de conclusion.
Après quelques pages difficiles, j'ai donc beaucoup apprécié cette lecture !
Elle m'a fait réfléchir, elle m'a interpellé, ce qu'on demande à un bon livre.
Elle a également entrainé une augmentation de ma PAL (Fuyez si vous ne voulez pas qu'il vous arrive la même chose ! ).
Et je pense que ce challenge ne trouve son sens qu'après cette lecture. Sans cela, il n'est qu'une accumulation.
Petit bémol : la fin me semble trop rapide ! Elle laisse un goût amer où rien ne semble achevé.
Un livre de plus lu pour ma PAL et un deuxième livre lu pour le challenge "au bon roman".
tu me donnes très très envie pour un roman que j'ai déjà dans ma PAL depuis quelques temps... la réflexion que tu mènes m'intéresse tout autant parce qu'elle me taraude depuis longtemps : suis-je élitiste et condamnable parce que je ne peux souffrir Levy ou Musso ? si je reconnais qu'ils peuvent permettre l'entrée en lecture, je suis moins d'accord quand on fait d'eux des grands écrivains parce qu'ils sont beaucoup lus, le "beaucoup lus" n'étant pas pour moi gage de qualité... comme Stendhal, je préfère appartenir aux Happy Few...
RépondreEffacerJ'adore la présentation que tu fais de ce roman ! décidément, Laurence Cossé a une écriture originale ! J'avais bien aimé le Coin du Voile, qui était déjà très original ! Celui ci va me plaire je sens !
RépondreEffacerJe suis pour la lecture pour tous !
RépondreEffacerIl y a des personne qui occupent des postes importants dans leur travail et qui aiment lire des lectures légères le soir pour se détendre.
Et, le lecteur qui lit des livres d'auteurs à à succès aura peut-être envie plus tard de découvrir auteurs et d'autres univers ...
Comme toi la lecture de ce livre m'a interpellé, mais j'ai été totalement conquise du début à la fin. Je te rejoins sur le fait que l'important c'est que les livres soient lus. La littérature est tellement riche que chacun peut trouver ce qui lui correspond. C'est tout simplement magique!
RépondreEffacerJe participe également au challenge de Praline, même si pour le moment, je n'ai pas encore pu me procurer un seul livre de la liste....
@ George : je suis d'accord, beaucoup lu ne signifie pas de qualité. Je voulais juste dire qu'ils trouvent leur public. Ensuite, je ne pense pas que tu sois condamnable. Je crois que nous avons la chance de pouvoir lire un grand spectre de livre. Si certains ne nous plaisent pas, c'est notre affaire (Musso et Levy, j'aime pas non plus XD)
RépondreEffacer@ Océane : bonne lecture alors :)
@ Clara : Bien dit ! et ça fonctionne un peu comme une série bête à la télé qu'on regarde parce qu'on est trop fatigué.
@ Bookine : c'est vrai que c'est fascinant de voir que chacun peut y trouver son compte :)
Moi aussi, ce thème m'avait interpellée ... d'ailleurs pas sûre que ce roman fasse partie de la bibliothèque des bons romans. ;) Même si je l'ai aimé, il n'arrive pas à la cheville d'autres bons romans. :)
RépondreEffacer@ Leiloona : C'est vrai, je trouve aussi qu'il y a certaines lenteurs et d'autres passages qui sont trop rapides, comme la fin. Mais je crois que je garderais surtout la réflexion suscitée par l'auteur, et c'est déjà pas mal :)
RépondreEffacerBonsoir, personnellement, j'ai beaucoup apprécié ce roman très bien écrit. http://dasola.canalblog.com/archives/2012/10/06/25195397.html Bonne soirée.
RépondreEffaceroui, c'est un bon petit roman et après trois ans, j'en garde un excellent souvenir, c'est un signe :)
EffacerBonsoir, on m'a offert ce roman il y a quelques années et je l'avais lu avec grand plaisir. Je n'avais pas éprouvé de difficultés particulières. Et cela m'a permis de découvrir une romancière. Dommage qu'elle n'écrive pas beaucoup. Il paraît que La grande Arche est très bien. Bonne soirée.
RépondreEffacerJe note, il y a longtemps que je l'ai lu mais je m'en souviens encore très bien.
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