lundi 20 décembre 2010

Meurtre en Mésopotamie d’Agatha Christie


Les romans d’Agatha Christie que je préfère sont ceux qui se déroulent au Moyen Orient.
L’Égypte, la Mésopotamie, la Turquie, Istanbul, Bagdad, l’Orient-Express, tous ces lieux me font rêver.
Pour être honnête, ils me font rêver tels que l’écrivain les a connus, dans les années folles de l’entre deux guerre, ou plutôt tels qu’ils sont racontés dans ses romans. Ils me font rêver comme peut le faire le seul nom de « Bangkok » pour son exotisme sous-jacent qui n’évoque aucun gratte-ciel à celui qui n’y est jamais allé.
C’est également là qu’Agatha Christie a rencontré son second mari, Max Mallowan, ce qui ajoute évidemment une pointe de romantisme à ces lieux fantasmés.
J’en saurai bientôt plus, puisque La romancière et l’archéologue  doit rejoindre ma PAL à noël…

Mais revenons-en à mes relectures du moment. Le quatrième roman que j’ai pioché dans ma bibliothèque est Meurtre en Mésopotamie, un excellent spécimen de ces récits orientaux.
Il est évidemment dédié aux amis archéologues d’Agatha Christie et le personnage central est ouvertement inspiré d’une amie proche de l’auteur.
Le roman s’ouvre également sur une lettre exprimant le sentiment de cette femme habituée au luxe face à la réalité de Bagdad. Il semble qu’elle s’y soit bien adaptée, mais cela n’était pas donné au départ.

Miss Leatheran, infirmière britannique, est embauchée par le Pr Leidner, archéologue, pour s’occuper de sa femme sur le chantier de fouille qu’il dirige à coté de Bagdad.
Louise Leidner est une belle femme, plus jeune que son mari, mais semble névrosée. Certains membres de la mission archéologique la soupçonnent de se faire plaindre, tandis que quelques autres la ménagent en espérant un rétablissement.
Il faut dire que les membres de cette mission sont nombreux. Il y a un architecte anglais, un missionnaire français, miss Johnson, à qui l’on fait faire tout et n’importe quoi, un américain photographe, les Mercado, le jeune Coleman… une petite société fermée qui ne va pas manquer de s’écharper.
La jeune infirmière  s’installe et découvre la vie quotidienne de la mission, quand survient une première alerte. Certains ont entendu du bruit et l’on craint que des objets aient été volés. Mrs Leidner avoue également à l’infirmière qu’elle a peur d’être assassinée.
Ce qui va évidemment se produire quelques pages plus loin, laissant le champ libre à ce cher Hercule Poirot.

Dans ce roman, Miss Leatheran est le narrateur et elle raconte cette histoire après qu’elle ait trouvé son terme.
C’est un excellent choix. Il permet de disposer d’un point de vue omniscient, puisqu’elle a connaissance de tous les points importants de l’affaire, tout en conservant une part de subjectivité, notamment dans les rapports humains. La narratrice fait des commentaires personnels savoureux sur tous les personnages, y compris sur Poirot dont elle trouve les méthodes bien surprenantes.
C’est très réjouissant et j’ai redécouvert ce roman dont je ne me souvenais même plus du coupable, malgré au moins trois visionnages du téléfilm.
On sent également qu’Agatha Christie connait parfaitement ce milieu et tout est décrit avec une précision remarquable.
Une belle relecture !

J’ajouterais également cette petite réflexion personnelle.
Je lis et j’entends souvent des réflexions du genre : « décortiquer un roman, cela m’ôte le plaisir de lire » ou « l’analyse littéraire gâche la lecture ». Ce à quoi je réponds « oui, quand elle est mal faite ! » car voyez-vous, je trouve un réel plaisir à dégotter des sens cachés chez les écrivains du 19e ou à observer chez un auteur de roman policier son usage des règles de son art.
L’une des caractéristiques fortes de la paralittérature, c’est la présence d’un métadiscours, c’est-à-dire d’un discours réflexif portant sur sa propre écriture.
Ce genre de chose est fort rare dans les textes classiques où on lit rarement « on se croirait dans un vrai roman réaliste » dans la bouche d’un personnage.
En relisant Christie, j’ai trouvé un procédé récurrent qui montre qu’elle s’est approprié ce tic générique pour le transformer. Dans deux des quatre romans que je viens de relire, j’ai lu ces petites phrases du genre :
« je ne prétends pas être écrivain et connaître quoi que ce soit à la rédaction. » ou « ce n’est pas commode de savoir par quel bout commencer ».
Évidemment ce procédé est facilité par le récit à la première personne, mais cet excès de précaution est amusant quand on a lu Roger Ackroyd, où, au contraire, le narrateur affirme ses qualités d’écrivain !


Encore une belle relecture pour le challenge de George.
  

dimanche 19 décembre 2010

La mort dans les nuages d’Agatha Christie


Je poursuis ma série de billets sur Agatha Christie avec ce huis clos qui a dû être bien original quand il est paru. Aujourd’hui tout le monde prend l’avion, mais à l’époque, il ne devait pas y avoir tant de vol que cela.
Je dois avouer également que le temps m’a poussé à lire sous une bonne couverture dans mon fauteuil au coin du feu. J’ai donc finit plein de trucs, dont deux Agatha Christie qui trainait sur ma pile de livres en cours.
Voici le premier, le second est pour demain.

Sur la piste du Bourget, un avion se remplit progressivement de ses passagers. Chacun se dirige vers sa place, s’arrange avec d’autres passagers et s’installe pour le voyage.
L’avion décolle, les serveurs s’affairent et l’aéroport d’arrivé se rapproche. C’est là que l’un des serveurs s’aperçoit qu’une des passagères est décédée !
Avant même l’arrêt de l’avion, Hercule Poirot prend les choses en main et dirige l’enquête.
L’assassin a forcément utilisé une sarbacane, mais on n’en retrouve aucune dans l’avion et comment s’y est-il pris pour que personne ne le voie ? 
Et que vient faire cette histoire de guêpe dans tout cela ? 

On peut dire qu’il se passe vite quelque chose dans ce roman.
Dès la page 14, Giselle est morte !
Ensuite, fort logiquement, les 230 pages restantes vont être consacrées à la recherche de l’assassin.
Je me demande souvent si Hercule Poirot est censé connaître l’assassin dès le départ. Il ne ferait ensuite que rechercher des preuves pour étayer son hypothèse. Mais je crois bien que non. En tout cas, ici, il va de fausses pistes en fausses pistes.
Tout le livre ne se passe pas dans l’avion. La première moitié du roman a pour cadre cet espace clos, où chacun voit sa vie dévoilée par Poirot. Les chapitres de la seconde moitié sont ensuite intitulés du nom de l’endroit où se déroule l’action.
Les informations recueillies au début sont directement liées à la suite, et tout finit par être relié de façon assez magistrale (mais je ne voudrais pas trop en dire).

Encore une fois, l’adresse de l’auteur à construire une histoire complexe mais lisible à la fin est remarquable. Par contre, je n’ai pas été frappée par les petites phrases habituelles portant sur l’art d’écrire ou sur le personnage de Poirot. Il y a bien une première description un peu méprisante, mais il occupe ensuite une position centrale sans que le narrateur ne soit vraiment « taquin ».
J’avais gardé un bon souvenir de ma première lecture, i l se confirme, mais sans plus.

C’est un excellent Poirot quand même, et si vous ne l’avez jamais lu, ne vous fiez pas à mon avis. J

Encore un billet de lecture pour le challenge Agatha Christie de George.



samedi 18 décembre 2010

Le temps de la sorcière d’Arni Thorarinsson [Destination Islande]



Pour une fois, je vous livre un billet de lecture avant d’avoir terminé le livre.
Cela ne signifie pas que je ne le terminerai pas, mais c’est en cours, j’en suis précisément à la page 132.
Si je vous en parle avant la fin, c’est que cette lecture traîne un peu en longueur. Je ne dirais pas que je m’y ennuie, mais les pages ne se tournent pas bien vite car je lis plein de choses en même temps.
Or la date fixée pour le défi d’Evertkhorus était le 18 décembre. Je fais donc un premier billet où je suis sure de ne pas vous dévoiler la fin, puisque je ne la connais pas, et j’en ferais sûrement un autre quand j’aurai terminé.

La littérature islandaise m’était totalement inconnue.
Je situe l’Islande, rassurez-vous, mais je suis bien incapable de citer un auteur ou un titre.
J’ai donc cherché un peu pour ce défi « Destination Islande » et j’ai trouvé deux auteurs de polars : Thorarinsson et Indridason qui est apparemment plus connu.
Mon choix s’est ensuite fait en fonction des synopsis, et voici de quoi parle les 100 premières pages de ce roman.

Einar, journaliste qui travaille pour le plus grand quotidien d’Islande, vient d’être envoyé au nord de l’île pour développer une petite rédaction locale du journal. C’est évidemment une punition, puisque Einar est accompagné par Asbjörn, ancien rédacteur en chef et responsable de cette rédaction, avec lequel il n’a jamais pu s’entendre.
Il leur faut donc travailler ensemble, alors qu’Einar tente d’arrêter l’alcool et vit plutôt mal le fait d’être relégué dans ce coin paumé.
La femme d’Asbjörn et Joa, la photographe du journal, complètent ce tableau de naufragés qui tentent de retrouver des repères.
Évidemment, comme dans toute petite bourgade qui se respecte, il ne se passe pas grand-chose, mais ce n’est qu’apparence. Lors d’une sortie rafting, la femme du pdg d’une grande entreprise locale est tombée dans la rivière et a succombé à ses blessures. Un peu plus au nord, dans un village où la spéculation industrielle menace la campagne alentour, des rixes de jeunes racistes ont dégénéré.

Ces 130 premières pages ne contiennent pas vraiment d’effet retentissant ou de meurtre sanglant. Je pense que la mort de cette femme en rafting est un crime, mais j’ai cru comprendre qu’il y en avait un autre qui arrivait. Il me reste encore 300 pages, ce qui justifie que les évènements s’enchaînent tout doucement.
Car il faut bien le dire, il ne se passe pas grand-chose, et pourtant j’apprécie vraiment la lecture de ce livre. Une série de micro évènements, la vie quotidienne à Akureyri, les déboires familiaux d’Einar me plaisent et les descriptions de la société islandaises sont vraiment intéressantes.
Certes, les aspects de cette société choisis par l’auteur ne sont pas les plus valorisants, puisqu’il parle de racisme et de violence, mais je découvre un pays que je ne connais absolument pas.

Je dois toutefois mettre un bémol qui me fait sourire, mais je dois avouer que les noms des personnages comme les noms des lieux ne sont pas simples à mémoriser.


Merci à Evertkhorus pour m'avoir fait découvrir un petit morceau de littérature islandaise :)



L’heure zéro d’Agatha Christie

Dans mon panthéon Christien (ou christique mais là, il pourrait y avoir confusion) figurent quelques romans dont les histoires m’ont particulièrement plu.
L’heure zéro en fait partie.


Mr Nevile  Strange, la trentaine, joueur de tennis professionnel et membre de la bonne société anglaise, a eu l’idée bizarre de réunir pour les vacances son ex-femme et sa nouvelle femme.
Audrey, sa première femme, est aussi une amie d’enfance, et il voudrait pouvoir continuer à la voir malgré leur divorce. Kay, sa nouvelle femme, est une jeune beauté superficielle qui ne goûte pas vraiment la situation.
Il y a aussi Thomas Royde, rentré des Indes pour six mois et qui a grandi avec Nevile et Audrey. Il cache moyennement bien son petit faible pour elle.
Cette société se retrouve à la Pointe-aux-mouettes, chez Lady Tressilian, dont le mari fut le tuteur de Nevile pour des vacances qui vont être mouvementées.  

Comme le titre l’indique, il est encore question de temps dans cette histoire.
L’art de l’auteur a été de tendre ce récit pour que le lecteur ait conscience du temps qui passe. Il ne s’agit pas de s’identifier à un personnage, puisque les évènements s’enchaînent sans qu’aucun d’entre eux n’attende un meurtre, mais de créer une attente qui donne l’impression qu’à chaque page il peut se passer quelque chose.
Le roman commence par un prologue où, lors d’un dîner d’hommes de lois la discussion vient à porter sur les qualités d’un bon roman policier. L’un d’entre eux affirme qu’un bon roman policier ne présente pas le meurtre au début mais doit faire monter la tension jusqu’à l’heure H, celle du meurtre.
J’aime beaucoup ces allusions qu’Agatha Christie place souvent dans ses romans. Elle met ensuite le système en application. La première partie du roman se déroule de date en date et commence plus de six mois avant l’heure H. Les différents personnages sont présentés, on les voit évoluer dans leur vie quotidienne et surtout, on les entend exprimer leur avis à propos de leurs futures vacances.
Les invités arrivent ensuite les uns après les autres, les vacances se déroulent dans une atmosphère très tendue et certains décomptent les jours les séparant de la fin des vacances, jusqu’au moment fatidique.

Encore une fois, le talent d’Agatha Christie est manifeste et ce roman original montre une société où les petits secrets sont très dangereux.
J’ai également découvert le superintendant Battle, haut gradé de Scotland Yard, et le hors série de Lire m’a appris qu’il s’agissait d’un héros récurrent, présent dans quatre autres romans.
Ce hors série est décidément bien fait et je pense que je pourrais ajouter une contrainte à ma participation au challenge de George : lire un roman avec chacun de ses enquêteurs fétiches que sont Parker Pyne, Harley Quinn, le superintendant Battle, le colonel Race, Ariadne Oliver, les Beresford et bien sûr Hercule Poirot et Miss Marple.

Cette lecture est ma troisième participation au challenge de George.



vendredi 17 décembre 2010

The murder of Roger Ackroyd, with David Suchet


Alors que je rédigeais mon billet sur le Meurtre de Roger Ackroyd, hier après-midi, je me suis dit qu’il serait logique de le faire en regardant Hercule Poirot sur TMC.
Je me suis donc installée devant la télé et là, surprise, l’épisode diffusé s’intitule justement Le Meurtre de Roger Ackroyd, ou plutôt The murder of Roger Ackroyd  puisqu’avec la TNT, je peux le regarder en VO sous-titrée.  
J’ai donc pu comparer avec une mémoire toute fraîche.

L’avantage de cette histoire, quand on connait la fin, c’est de pouvoir observer comment les fausses pistes sont traitées.
Le statut de suspect se transmet d’un personnage à l’autre et le réalisateur se focalise sur chacun au fur et à mesure de la reconstitution des évènements.
Car dans cette histoire, il me semble que le plus important c’est justement le temps et l’enchaînement des différentes phases du meurtre. La position de chaque protagoniste au moment du meurtre est reconstituée, puis leurs histoires individuelles avant de pouvoir observer le panorama général, à la toute fin de l’épisode.
Le réalisateur accentue également cet effet en disposant sans cesse dans le champ de la caméra des horloges et des pendules qui décompte le temps pendant le meurtre et pendant l’enquête. Elles marquent les mouvements de chacun des suspects ainsi que ceux de Poirot et constituent un indice à part entière, ce qui est évidemment moins visible dans le roman.

Un autre aspect apporté par ce téléfilm est celui des décors. Dans cette série de la BBC, une grande attention a été portée aux décors années 1930 et aux costumes. Aucun bal ou grande comtesse dans cet épisode et donc aucune robe affriolante. Par contre, la villa de Roger Ackroyd est un superbe spécimen du style art déco anglais, qu’il s’agisse de l’architecture ou de la décoration intérieure.

Mais la difficulté principale de cet épisode résidait dans le traitement de la narration. Comment retranscrire la lecture d’un journal ?
Pendant les premières minutes, j’avoue avoir été troublée. Le journal était filmé, mais la voix qui lisait était celle d’Hercule Poirot. Je me suis donc demandée si c’était lui qui l’écrivait mais la situation s’éclaircit rapidement. Cette lecture intervient ensuite comme une ponctuation après chaque hypothèse invalidée et permet de faire monter la tension. Le journal apparaît également gondolé, ce qui s’explique dans les dernières minutes.
La position de Poirot n’est pas la même non plus. Dans le roman, il est au second plan, ce qui n’est pas le cas ici. En tant que héros de la série, il occupe la place principale.

Il faut aussi dire quelques mots de David Suchet. Quand un personnage romanesque est incarné si longtemps par le même comédien, il est difficile de l’imaginer avec un autre aspect.
Poirot et Suchet se superposent et la panoplie des tics et manies de Poirot lui semble naturel.
Si vous pouvez regarder un épisode en VO, vous verrez également que l’acteur adopte un accent français (oups, pardon, Belge) et utilise des mots en français qui ne sont pas traduits. Ceci explique que certaines répliques des épisodes en VF soient parfois étranges, comme lorsque Hastings reprend Poirot en reformulant ses phrases. En réalité, il traduit en anglais ce que Poirot vient de dire.

En bref, une bonne adaptation du roman qui ne réserve pas la même surprise que le livre, bien sûr (puisque c’est Poirot qui raconte) mais qui se regarde très bien pendant 1h30.

Et un billet de plus pour le challenge de George. 



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